Du Japon à l’international, abstraction et création
Yayoi Kusama, âgée de 93 ans, est une artiste japonaise de renom mondial, dont les oeuvres sont souvent décrites comme avant-gardistes. Entre excentricité assumée et psychédélisme penchant vers l’hallucinatoire, l’artiste s’est fait connaître notamment grâce à ses motifs emblématiques des pois, ou polka dots, source créative récurrente depuis son enfance.
« Ma vie est un pois perdu parmi des millions d’autres pois. »
Yayoi Kusama
Marquée par un contexte familial turbulent, entre adultères paternels et autorité maternelle, Yayoi Kusama exprime très tôt ses ambitions artistiques. Elle émigre vers les États-Unis au milieu des années 1950 et laisse s’exprimer sa créativité au travers de grandes oeuvres psychédéliques aux formes phalliques, qui symboliseraient sa hantise des relations sexuelles qu’elle cherche à exorciser.
Fait marquant de sa carrière, Yayoi Kusama s’invite illégalement à la Biennale de Venise en 1966 avec l’installation de « Narcissus Garden ». Composée de plus d’un millier de boules métalliques, cette oeuvre rendait hommage au mythe de Narcisse, en permettant aux spectateurs regardant ces sphères de contempler leur propre reflet.
Un art significatif
Pour Kusama, les polka dots incarnaient une sorte d’infini, une manière de percer les secrets de l’univers. Elle cherchait, par l’accumulation presque maniaque de ces motifs, à « mesurer l’infini ». Qualifiée de « prêtresse d’un art total, hypnotique et coloré », son art décalé aux courbes impressionnantes et formes amusantes, mais surtout festif, fait écho à un univers enfantin mettant en scène fleurs et citrouilles géantes.
« Yayoi Kusama joue avec la notion d’espace. Avec des miroirs, elle le démultiplie. Avec des pois, elle l’envahit. Avec des lumières, elle rompt la frontière entre le spectateur et l’environnement ».
L’artiste elle-même déclare pratiquer un art psychosomatique. Si la peinture s’incarne comme un exutoire pour l’artiste, reproduire par milliers des pois et des phallus, traumatismes de son enfance, serait une façon de l’aider à se débarrasser de sa peur.
De plus, l’artiste est rapidement devenue une figure activiste reconnue. Emblème des années hippies, elle se battait pour la liberté de jouir de son corps, la liberté sexuelle et faisait l’éloge de la nudité avec des performances et happenings décalés…dans les lesquels les poins s’invitaient toujours ! Elle décrivaient ces évènements où elles peignaient un infini de pois sur des corps nus, et qu’elle avaient nommés « Auto-Oblitération », comme un moyen « d’oblitérer l’individu et de le renvoyer à l’univers infini ». Elle alla même jusqu’à qualifier cela de magie.
À son retour au Japon dans les années 1970, l’artiste atteinte d’un trouble obsessionnel se fait volontairement interner dans un hôpital psychiatrique, où elle réside encore aujourd’hui. Loin d’entraver son art, cette décision lui permit de continuer à créer des oeuvres abstraites et immersives dans un atelier isolé et de maintenir sa santé mentale.
Populariser l’excentricité : une collaboration de luxe
Au début de cette nouvelle année, l’artiste japonaise s’est de nouveau associée à la célèbre marque de luxe Louis Vuitton, 10 ans après leur première collaboration, pour une collection inédite sous le signe des pois. Cette collection comportera 400 pièces en édition limitée : t-shirts, sacs, robes et parfums seront décorés de pois multicolores et de fleurs psychédéliques.
À l’occasion de cet évènement, une série de pop-up store à l’effigie de Kusama vont ouvrir leurs portes. Les passants seront ainsi surpris de découvrir une statue gonflable géante de l’artiste en se rendant au Harrods de Londres, en passant devant le Louis Vuitton des Champs Élysées ou encore en découvrant une version robotisée d’elle dans la boutique de la Place Vendôme (voir (https://www.youtube.com/watch?v=l7z2JviIvYY).