Une problématique alarmante qui incite les États à prendre des mesures
Au cours de ces cinq dernières décennies, 7 milliards de tonnes de plastiques ont été relâchées. Un constat inquiétant qui implique et divise l’opinion publique. Tous les ans, 460 millions de tonnes de plastique sont produits. Souvent rejeté dans les océans, le plastique représente 85% de la pollution marine. C’est d’ailleurs l’une des raisons qui poussent les membres de l’ONU à s’accorder sur un Traité pour la haute mer représentant aujourd’hui 60% des océans (lire aussi : https://www.csactu.fr/protection-de-lenvironnement-cinq-faits-a-retenir-sur-la-haute-mer-et-son-traite/)
La crise urgente engendrée par la pollution a donc réunis les ministres des États à Paris dans le but d’élaborer une première version d’un “traité international juridiquement contraignant” afin d’initier un changement. Les États, les entreprises produisant du plastique ainsi que les ONG ont un rôle déterminant en ce qui concerne les initiatives visant à faire face à la pollution plastique. C’est pourquoi ces acteurs étaient invités à prendre part au débat.
«Si on ne fait rien, en 2060, il y aura plus de plastique que de poissons dans les océans. »
Christophe Béchu , ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires (franceinfo)
De nos jours, l’idée du recyclage plastique dédramatise, en quelque sorte, son utilisation. Pourtant, celui-ci se fabrique à partir de 99% de carburant fossile. Ce qui explique pourquoi, en France, cette substance ne se recycle qu’à hauteur de 27%. Nathalie Gontard, chercheuse à l’INRAE (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement) affirme qu’un plastique recyclé ne va pas pouvoir être reproduit à l’identique. Ainsi, il va servir à la création d’autres objets dont le plastique n’est pas le matériau principal.
Par exemple, un bouteille plastique ne va pas pouvoir donner vie à une autre bouteille mais va contribuer à la création d’objet qui n’est pas composé entièrement de plastique. En effet, cette substance ne représente que 2 % des produits réutilisé. De plus, certaines particules se déposent sur les produits alimentaires et affectent la santé de l’humain. C’est pourquoi, Nathalie Gontard soutient l’idée qu’il est nécessaire d’en réduire sa consommation.
La baisse de la consommation de plastique : une nécessité reconnue par certains pays
Surnommée la coalition de Haute ambition, l’alliance d’une cinquantaine de pays dont font partie le Canada, le Royaume-Unis et les membres de l’Union Européenne tels que la France, défendent un texte audacieux qui vise la suppression de la pollution plastique sur le long terme. Les pays grands producteurs et consommateurs de cette substance issue du pétrole tels que la Chine, le Japon, l’Arabie Saoudite et les États-Unis s’opposent à des mesures contraignantes. Ils souhaitent la mise en place de mesures pour des réglementations volontaires plutôt qu’obligatoires.
Selon le Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, la coalition cherche à mettre en œuvre 3 objectifs concernant la pollution plastique :
- Limiter la consommation et la production de plastiques à des niveaux durables
- Promouvoir une économie circulaire des plastiques qui protège l’environnement et la santé humaine
- Assurer une collecte, une gestion et un recyclage efficaces des déchets plastiques
La coalition ne va donc pas chercher à éradiquer le déchet mais plutôt à modifier le cycle de vie du plastique. Issu d’une ressource non renouvelable qu’est le pétrole, le plastique nécessite la production de dioxyde de carbone lors de l’extraction et de la distillation du pétrole. Non seulement ce processus contribue de manière colossale au changement climatique mais il met aussi en danger ces producteurs par le biais de ses composés chimiques nocifs. Très peu recyclé, il est souvent incinéré à ciel ouvert dans les pays en développement. Cette activité produit ce que l’on va appeler le noir carbone. C’est un polluant estimé 5 000 fois supérieur au dioxyde de carbone.
«Sans plafonnement et réduction immédiate de la production, on court à la catastrophe.»
Joëlle Hérin, Greenpeace Suisse
Un Traité retardé par les désaccords des États
Durant les pourparlers à Paris, des désaccords prévisibles se sont fait entendre. La coalition de haute ambition et les pays jugés plus tolérants envers l’utilisation du plastique s’opposent. Malgré les tentatives de la coalition, les pays pétroliers, les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) et les entreprises consommatrices ou productrices de plastique ont cherché à bloquer les avancées du débat. Parmi ces acteurs défavorables à des règlementations contraignantes, des lobbyistes de grandes marques étaient présents. Parmi elles, Coca-Cola, Nestlé, Lego, ou encore Danone,… Beaucoup ont pris part au débat. Si bien qu’il a été nécessaire de mettre sur la touche un grand nombre d’acteurs et observateurs.
« Deux jours pour dire qu’on est d’accord sur le fait qu’on n’est pas d’accord. Les bloqueurs ont rempli leur mission et nous voilà désormais avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête. »
Henri Bourgeois-Costa, Conseil en Environnement pour la Fondation Tara Océan
Christophe Béchu a affirmé que la coalition dispose d’alliés importants pour mener à bien leurs objectifs. Il cite des acteurs tels que l’Organisation Mondiale du Commerce qui pourra potentiellement apporter un soutien économique durant cette transition écologique. Avec l’aide des douanes, la coalition souhaite taxer directement ce qu’on va appeler les payeurs-pollueurs. Autrement dit, on va taxer les producteurs de plastique à l’échelle mondiale pour diminuer son utilisation. Des conséquences économiques qui, si elles sont fortes, pourraient bien dissuader les consommateurs.
Seulement, cette mesure peut fonctionner si les acteurs les plus réticents à l’abandon du plastique s’accordent sur le Traité. En effet, les ambitions de la coalition se heurtent, en partie, au modèle capitaliste actuel. C’est le modèle économique majoritairement en vigueur dans nos sociétés. Est- il inévitable d’avoir à choisir entre écologie et économie ? Ainsi, scindé en deux groupes, ce Traité rassemble et divise face à l’urgence climatique. Cependant, cette réunion a pu donner lieu à une première version. Elle sera examinée lors de la prochaine réunion à Nairobi, au Kenya.