Une affaire qui devrait faire couler beaucoup d’encre. Alors que le Top14 bat son plein et que le Tournoi des 6 Nations commence le week-end prochain, des soupçons de “corruption” pèsent sur deux grands noms du rugby français. La Brigade de répression de la délinquance économique a étudié les rapports ambigus entretenus entre Bernard Laport et Mohed Altrad.
Un « rapport de police accablant », selon L’Equipe
C’est L’Equipe qui a lancé la rumeur. Et on peut dire que celle-ci est fondée. En effet, le journal a eu accès au rapport de la Brigade de répression de la délinquance économique (BRDE). Cette dernière est reliée à la Police Judiciaire de Paris et est chargée de lutter contre la criminalité financière. C’est une brigade composée de policiers et d’agents des finances publiques. Ces représentants de l’Etat étudient les éventuels cas de fraude fiscale.
Pendant près de 4 ans elle a enquêté sur les liens ambigus entre la FFR et le club de Montpellier. Elle a remis son rapport au Parquet National Financier en juillet 2021. L’Equipe a eu accès à ce dossier de 76 pages. Celui-ci est qualifié d’« accablant » dans l’édition du 17 janvier 2022. Il pointe notamment les pratiques illégales de deux personnalités du rugby français : Bernard Laporte et Mohed Altrad.
Des soupçons de « corruption », « prise illégale d’intérêt » et « trafic d’influence »
L’un est président de la Fédération Française de Rugby (FFR), l’autre est le président du club de rugby de Montpellier (actuellement 4ème du Top14). Qu’ont en commun Bernard Laporte et Mohed Altrad dans cette affaire ? Dans le rapport de la BRDE, on trouve quatre éléments à l’encontre des deux hommes. Le principal point de ce dossier est l’affaire du sponsoring des maillots du XV de France en 2017. Le rapport soupçonne le président de la FFR d’avoir favorisé le groupe Altrad pour racheter le droit d’apparaitre sur les maillots des Bleus. Et cela au détriment des autres concurrents (dont notamment Orang, Société Générale ou encore BMW). Ces derniers s’étaient vus proposer une offre de près de 10 millions d’euros. Cependant, un mois après c’est le groupe de Mohed Altrad est désigné sponsor de l’équipe de France en échange d’un contrat de 6,2 millions d’euros.
Le rapport accuse également Laporte et Altrad d’avoir signé un contrat d’image d’une valeur de 150 000€. Ce contrat lie le président de la FFR au président du club de Montpellier. Il l’enjoint à lui venir en aide dans certaines situations. La BRDE juge cet accord resté secret comme une « prise illégale d’intérêts » et un « trafic d’influence ». Bernard Laporte est également accusé d’avoir annulé la suspension du stade de Montpellier pour un match. Et d’avoir fait passer son amende de 70 000€ à 20 000€. Cette décision était secrète, jusqu’à l’enquête de la BRDE. Elle a fait suite à plusieurs appels téléphoniques de Bernard Laporte. Enfin, le dernier élément à charge accuse Bernard Laporte d’avoir engagé la société Score XV sans un véritable contrat. De plus, cette dernière a obtenu des rémunérations étonnamment élevées.
Un procès prévu pour septembre 2022
Au final, le rapport de la BRDE accuse en premier lieu les pratiques frauduleuses du président de la FFR Bernard Laporte et met notamment l’accent sur ses jeux d’influence avec le club de Montpellier, dirigé par Mohed Altrad. Mais le rapport mentionne également l’implication de deux autres acteurs dans une moindre mesure : Serge Simon, le vice-président de la FFR, Claude Atcher, directeur général du Groupement d’intérêt public France 2023. En effet, il aurait proposé le contrat de sponsoring à Mohed Altras, et Benoît Rover, gérant de la société Score XV.
Suite à cette enquête de la BRDE, le Parquet National Financier a indiqué aux 5 acteurs concernés par le rapport (Laporte, Altrad, Simon, Atcher et Rover) qu’un procès aurait lieu en septembre 2022. Pour rappel, Bernard Laporte, qui était secrétaire d’Etat chargé des Sports de 2007 à 2009, a déjà été visé par plusieurs enquêtes pour des pratiques fiscales douteuses et a été suspecté de soutiens politiques, mais aucune preuve n’a été mise en évidence et ces enquêtes ont abouti à des non-lieux.