Le football était sa passion, une échappatoire à la vie dans les mines
L’histoire atypique, mais néanmoins fabuleuse de la vie de Raymond Kopaszewski, commence dans le Nord de la France. Né en 1931 à Nœux-les-Mines dans le Pas-de-Calais, il est le fils d’immigrés polonais. Il grandit alors dans une maison juste en face du stade de foot de sa ville. Il confiera plus tard que son premier ballon était celui de soldats allemands qui l’avait laissé près de chez lui durant l’occupation.
Raymond fait face à la réalité du quotidien de l’époque, car dès l’âge de 13 ans, le travail à la mine lui est imposé. Il en gardera un souvenir catastrophique selon ces dires et perdra même un doigt lors d’un éboulement. C’est à ce même âge qu’il intègre l’US Nœux-les-Mines et épate déjà tous ces entraîneurs. Lors du concours du jeune footballeur de 1949, le jeune Raymond est repéré par le SCO d’Angers. Leur flair ne trompe pas, ils viennent de signer un futur immense joueur.
Kopa et Reims à la conquête de la France
Les deux premières saisons sont décevantes, malgré de bonnes performances personnelles. Celui que l’on surnomme désormais Kopa, fait donc un choix, c’est celui de rejoindre un club plus ambitieux. C’est donc vers son club de cœur qu’il va se tourner. En effet, le Stade de Reims et l’un des clubs en vogue de l’époque avec son coach Albert Batteux. Il est désormais accompagné de joueurs extrêmement talentueux comme le prolifique Just Fontaine, Roger Piantoni ou encore l’expérimenté Pierre Sinibaldi.
Entre 1951 et 1956, il décroche deux fois le titre de champion de France et inscrit 48 buts. Il est alors, sans conteste aucun, le meilleur joueur de l’équipe champenoise. En 56, le Stade de Reims va d’ailleurs réussir l’exploit d’atteindre la finale de la première édition de la Coupe d’Europe des clubs champions. Défait par le Real Madrid 4 buts à 3, c’est loin d’être la dernière fois qu’il aura à faire avec ce club.
Kopa, l’ADN d’un précurseur
Pour l’époque, Kopa avait tout du sportif révolutionnaire. C’était déjà un formidable meneur de jeu. À Reims, il était positionné dans l’axe, en soutient des attaquants. La palette offensive de Kopa était complète, avec tout d’abord sa capacité à déséquilibrer le bloc adverse.
En effet, ses dribbles ravageurs, composés d’appuis courts et supersoniques, faisaient trembler toutes les défenses. Et ce, pour pratiquement toujours pour adresser une passe millimétrée à ses coéquipiers. Cette formidable vision de jeu, lui-même dit qu’il l’a acquise en faisant attention de ne pas se faire surprendre par le gardien, lorsqu’ils jouaient tous dans le stade du village.
En plus d’être un fantastique pourvoyeur de ballon pour ces attaquants, Kopa n’hésitait pas à prendre sa chance quant il le fallait. Il était doté d’une frappe précise à l’intérieur ou hors de la surface. Kopa a fait mouche 158 fois lors de sa carrière.
En clair, il est l’un des artisans principaux de l’apparition d’un courant de jeu spécifiquement français. Le fameux « jeu à la rémoise », un jeu offensif, technique et rapide, à l’opposé du jeu physique en vogue jusqu’alors.
Un footballeur précurseur également dans la façon de gérer sa carrière. C’était un homme de caractère et il était bien décidé a changé les choses. Il mène une bataille contre les instances du football afin de mettre en place les contrats à temps pour les joueurs. Jusqu’à la fin des années 1960, les joueurs de football sont la propriété des clubs à vie.
Kopa lance à un journaliste de France Dimanche « Les footballeurs sont des esclaves ». La Ligue le suspend six mois avec sursis pour ces déclarations. La création d’un syndicat des joueurs est actée dès la fin de l’année 1961 : l’UNFP. Raymond Kopa en devient alors le vice-président. Le contrat à temps que le syndicat réclame est mis en application en France en 1969.
Kopa, le Real et ses rêves d’Europe
C’est à l’été 1956 que Raymond Kopa devient le premier joueur français de l’histoire à quitter la France pour un grand club européen. Son choix se porte sur le grand Real Madrid.
Sa tâche est, par sa présence, de faire briller et de bonifier un effectif pléthorique. Il est entouré d’icônes intergénérationnelles comme Di Stéphano, Puskás ou encore Gento. C’est lors du match France – Espagne et de la finale Coupe d’Europe face au Real que Kopa a tapé dans l’œil du club madrilène.
Pendant trois ans, il ne va pas décevoir les espoirs placés en lui. Le Maestro français décroche deux titres de champions d’Espagne et marque 48 buts. Mais il va surtout contribuer à la légende des merengues en C1, déjà tenant du titre. Les trois éditions suivantes sont remportées par La Casa Blanca dont la finale de 59 face à son ancienne équipe de Reims. Il quitte l’Espagne l’été suivant pour retourner en Champagne.
Kopa et l’avènement de l’équipe de France sur la scène mondiale
Les raisons de son retour en France sont surtout, car il était devenu impossible de jouer avec les Bleus pour Kopa en restant au Real. Il découvre l’équipe de France en 1952 face à l’Allemagne. Il prend donc part à sa première Coupe du Monde en 1954 en Suisse. L’élimination en phase de poules des Bleus est édifiante, car le meilleur reste encore à venir.
En effet, lors de Suède 58 que cette équipe va exploser. Le prodige Just Fontaine inscrit 13 buts lors de cette Coupe du Monde et les Bleus se retrouvent en demi-finale face au Brésil. La France s’incline 5 – 2 contre la bande à Pelé et termine troisième en battant la RFA.
Absolument pas favoris, les Bleus de Kopa impressionnent le monde entier. L’histoire d’une belle équipe de France compétitive débute alors. Kopa finit sa carrière internationale prématurément à cause de gros différents avec le sélectionneur de l’époque.
Raymond Kopa termine sa carrière après sept saisons passées au Stade de Reims. Il continuera de jouer au football jusqu’à ses 70 ans. Il fut également le premier français à remporter le ballon d’or en 1958 à la suite d’une année extraordinaire. Kopa nous quitte en 2017 des suites d’une longue maladie et laisse derrière lui un héritage immense. Il est fait Officier de la Légion d’honneur en 1970 et depuis 2018, le Trophée Kopa est créé pour récompenser le meilleur footballeur de moins de 21 ans.
Pour finir, malgré les lourds ballons en cuire de l’époque, Kopa a survolé son époque et cette phrase de la presse résume bien le joueur qu’il était. « L’homme est adroit, dribble court, tire juste et fort des deux pieds, possède une bonne détente, un jeu de tête correct, sait être clairvoyant et joue avec ses coéquipiers. »
Article écrit par : Adrien Cochet