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Décryptage: quelles sont les règles à suivre à l’Assemblée Nationale ?

Une institution comme l’Assemblée Nationale est souvent remplie de complexité. Des mythes de tous types, plus ou moins vrais, sortent de la bouche de tout un chacun. Il est tant d’y voir plus clair, quoi de mieux que CSactu pour cela.

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L'Assemblée Nationale, à Paris, mai 2024. © Camille Fontaine
L'Assemblée Nationale, à Paris, mai 2024. © Camille Fontaine

Si jamais vous avez un peu de temps libre, vous pouvez vous amuser à lire le règlement complet de l’Assemblée Nationale. Finalement, il vous faudra beaucoup de temps libre, avec 313 pages. Il faudra s’armer de patience pour connaître tous ses secrets. Mais je vous rassure cela n’est pas très utile. Il est possible d’être bien plus synthétique. Si nous devions le résumer en quelques mots, le règlement ressemblerait à ça: il est interdit, quelle que soit la manière, de compromettre le bon déroulement de la démocratie française. Très concis, certes, mais nous allons rentrer dans les détails avec un exemple bien précis. 

Une polémique justifiée ?

La séance des Questions au Gouvernement du mardi 28 mai a été suspendue après que le député LFI, Sébastien Delogu, ait brandi un drapeau palestinien dans l’hémicycle. Voilà une situation assez délicate. Au premier regard, la réponse est assez simple. Ce geste a arrêté l’exercice de la démocratie le temps d’un instant, il doit donc être sanctionné. L’article 70 du règlement intérieur détaille les différents agissements qui peuvent être sanctionnés. On retrouve notamment l’interdiction des manifestations troublant l’ordre ou une scène tumultueuse. Et l’Instruction générale du bureau (il s’agit tout simplement complément au règlement initiale) penche aussi de ce côté. Il précise également que les députés n’ont pas le droit de brandir « de graphiques, de pancartes, de documents, d’objets ou instruments divers » lors des Questions au gouvernement.

Mais alors pourquoi débat-on ?

La question est légitime, puisqu’au vu des articles cités, une sanction ne devrait pas faire débat.

La France Insoumise ne veut pas de la Vème République et ne respecte pas ses règles, il s’agit d’une sanction logique. Comme pour notre député Grégoire de Fournas, c’est le tumulte que cela crée qui est jugé et pas la forme de la manifestation. C’est du bon sens

Député Rassemblement National de la première circonscription du Tarn, Frédéric Cabrolier.

Mais le problème principal n’est pas celui-ci en particulier mais son ampleur.

Pour rappel, dans la foulée de l’incident, le bureau de l’Assemblée nationale s’est réuni, pour décider d’une sanction. Celle-ci a ensuite été validée par un vote « assis-levé » des députés dans l’hémicycle. Sébastien Delogu a écopé de la plus haute sanction prévue par l’article 73 du règlement de l’Assemblée nationale: la censure avec exclusion temporaire. Celle-ci s’élève à une exclusion de quinze jours accompagnée d’une privation, pendant deux mois, de la moitié de l’indemnité parlementaire allouée au député. L’addition est salée et elle ne passe pas chez les Insoumis. “Si on suit le règlement à la lettre la sanction est logique mais c’est disproportionné, on aurait totalement pu reprendre la séance normalement. Il s’agit du seul choix de la présidente de l’Assemblée nationale. D’ailleurs, une pétition a été lancée pour la sanctionnée”, s’insurge Sylvie Ferrer député LFI de la 1ère circonscription des Hautes-Pyrénées.  

Un contre-exemple troublant

Revenons un peu en arrière, en 2019, le député Sébastien Nadot, élu sous l’étiquette LREM avait brandi une banderole à l’Assemblée Nationale sur laquelle on pouvait lire : «La France tue au Yémen.» Ce geste similaire à celui de Sébastien Delogu avait vivement fait réagir le président de l’Assemblée de l’époque, Richard Ferrand. Mais les sanctions données sont interpellantes, un simple rappel à l’ordre et une inscription au procès-verbal.  C’est là que les choses deviennent complexes. Pourquoi n’ont-il pas eu les mêmes sanctions? Il n’y a tout simplement aucune réelle explication. Pour le député RN Frédéric Cabrolier la réponse est toute trouvée “un drapeau a plus d’impact qu’une simple pancarte, tout simplement”. Il s’agit seulement d’une supposition, rien de concret.

Des erreurs des deux côtés

Essayons de poser les choses et de s’extirper quelque peu du règlement. En brandissant ce drapeau dans une institution telle que l’Assemblée Nationale, il a permis de mettre en avant un dilemme important: doit-on reconnaître la Palestine?

C’est un geste courageux mettant en avant une question primordiale, je l’ai applaudie pour cela

Député LFI Sylvie Ferrer.

Bis repetita

Une semaine après tout juste, La France Insoumise n’a pas abdiqué. Ce mardi 4 juin, les députés du parti, dirigé par Jean-Luc Mélanchon, sont bien habillés. En costume, trois couleurs se distinguent clairement. Une partie en rouge, un autre en verte et la dernière en blanc. Cela ne vous rappelle-t-il pas quelque chose? Le drapeau de la Palestine, bien sûr. Et ils ne s’arrêtent pas là puisque quelques minutes plus tard la collègue de Sébastien Delogu, Rachel Keke réitère en brandissant le drapeau de la Palestine. “Mon collègue Sébastien Delogu était peut-être du mauvais côté du règlement, mais du bon côté de l’histoire”, a réagi la député Insoumise sur X après son geste.

Résultat des courses. La Présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, lui a infligé un rappel à l’ordre avec inscription au procès-verbal. Elle a aussi annoncé que le bureau de l’Assemblée serait convoqué pour discuter d’une autre sanction plus conséquente. Contrairement à son collègue, la punition ne sera pas immédiate. Comme quoi, les règles ne sont pas fixes et soumises à différentes interprétations.

Alors, qui a raison? Si nous nous enfermons stricto sensu dans le règlement, oui, Monsieur Delogu et Madame Keke doivent être sanctionnés. La raison est simple, ils ont compromis le bon déroulement de la démocratie française le temps d’un instant. Le niveau des sanctions (seulement pour Monsieur Delogu pour le moment) lui est déjà plus discutable. Mais attention, quelques fois, il faut savoir sortir un peu du cadre pour dénoncer des situations inhumaines qui doivent être mises au premier plan… C’est maintenant à vous de vous faire votre propre avis.

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