Commission d’enquête, de quoi s’agit-il ?
Les commissions d’enquête de l’Assemblée nationale sont des réunions qui portent sur un sujet à l’initiative des députés ou d’un groupe politique.
Ces commissions servent à questionner des spécialistes sur un sujet déterminé pour en déduire des solutions souvent matérialisées par des projets ou propositions de lois. Il peut s’agir de chercheurs, de patrons d’entreprises, de ministres ou bien comme ce jeudi 16 mars, de chefs d’État.
Une commission d’enquête sur l’indépendance énergétique
Depuis octobre et à l’initiative du groupe « les Républicains », a lieu une commission basée sur la question de la souveraineté et l’indépendance énergétique en France
Cette commission traite de l’évolution de l’énergie, de la création par le général De Gaulle en 1945 du « Commissariat à l’Énergie Atomique » (CEA) devant assurer l’indépendance et la souveraineté énergétique de la France à aujourd’hui, où la question climatique est sujette à un véritable clivage sur ce que doit être la principale source d’énergie.
C’est alors aux deux anciens présidents de la République d’être entendus par cette commission d’enquête. Il y a d’un côté Nicolas Sarkozy, dirigeant de 2007 à 2012 favorable à la prééminence du nucléaire. De l’autre, François Hollande, dirigeant de 2012 à 2017, partisan d’un usage à la fois des énergies renouvelables et des énergies déroulantes du nucléaire. Cette commission s’enregistre d’ailleurs dans un contexte particulier où la question énergétique émerge du fait de la guerre en Ukraine et des pénuries que le conflit engendre.
L’objectif de ces deux auditions étaient alors de comprendre les stratégies et mesures des deux anciens dirigeants pour ce qui est de l’indépendance énergétique française. Cela a donc donné lieu à une véritable défense des deux hommes politiques quant à leur bilan énergétique quitte à se rejeter la faute réciproquement.
L’audition de Nicolas Sarkozy : un ancien président « pro-nucléaire »
« Toute ma vie politique j’ai pensé que la filière nucléaire était une chance pour la France, je n’ai jamais changé d’avis sur ce sujet ». L’ex-chef d’État est catégorique, il a toujours été selon lui partisan du nucléaire.
Sarkozy a en effet affirmé tout au long de son audition que le nucléaire était la seule véritable solution. Selon lui, l’énergie nucléaire est la source la plus propice à accomplir les objectifs environnementaux en France et que les énergies renouvelables devraient être des compléments et non un moyen de substituer le nucléaire. L’ancien président de la République parle même avec hostilité d’un « lobby anti-nucléaire ».
Il a par la suite reproché aux politiques d’émettre des « signaux désastreux » ayant « découragé les meilleurs de nos étudiants [du centre nucléaire] ». L’audition a alors permis à Nicolas Sarkozy de s’attaquer au bilan de la gauche et notamment de François Hollande en affirmant que « nous avons perdu 12 ans » en ce qui concerne la politique énergétique et que « Pompidou a démodé De Gaulle, Giscard a démodé Pompidou, Chirac…moi, je l’ai un peu démodé. On ne peut pas dire à François Hollande qu’il ait démodé qui que ce soit… » L’ancien président de droite sous-entend ainsi l’inaction de son adversaire (et également) successeur politique sur la question de l’énergie.
L’audition de François Hollande : un ancien président plus nuancé sur la question du nucléaire
Président de la République de 2012 à 2017, François Hollande s’est lui aussi servi de cette audition pour protégé son bilan et s’en prendre à son (ancien) adversaire politique.
« S’il y a bien une décision qui a été contraire à la filière nucléaire c’est bien la loi NOME. » Il s’agit d’une loi promulguée en 2010, fondatrice de l’ « ARENH » (accès régulé à l’électricité nucléaire historique). Ici, François Hollande forme un certain revers de balle en affirmant que le mandat de Nicolas Sarkozy n’était point si protecteur du nucléaire que prétendu à l’audition d’avant.
François Hollande demeure d’après cette audition comme un homme politique adhérent à un certain mix énergétique en voulant le nucléaire comme source principale tout en rationalisant avec l’avènement des énergies renouvelables. Il se félicite par la suite du fait que pendant tout son mandat « les 58 réacteurs ont fourni de l’électricité sans difficulté majeure » et qu’il n’y a eu « aucun relâchement dans l’entretien et la sécurité des centrales ».
Enfin, l’ancien Président socialiste est revenu sur une décision politique qui lui avait été fortement reproché durant son mandat notamment par les « pro-nucléaires » c’est la fermeture de certaines centrales. En effet, Hollande a été élu au lendemain de l’accident nucléaire de Fukushima qui a impacté la vision quant au nucléaire aussi bien en Asie qu’en Occident. Il a ainsi justifié ses actions en admettant que la plupart des citoyens français sont favorables à un arrêt progressif du nucléaire au profit des énergies renouvelables.
Deux auditions sans véritable réponse
Si cette double audition était surtout un moyen pour les deux anciens dirigeants français de défendre leurs choix politiques, elle démontre aussi les deux visions opposées sur le nucléaire en France. Cette dualité soulève néanmoins de nombreuses problématiques dont une majeure : le nucléaire doit-il être voué à disparaître au bénéfice du renouvelable ou bien demeurer la (seule) véritable ressource pour produire de l’électricité ?
Pourtant, cette question ne semble point avoir de réponse satisfaisante lorsque l’on voit les véritables joutes sous Emmanuel Macron. L’actuel Président de la République a fermé « Fessenheim » en février 2020, une centrale nucléaire présente dans le Grand Est qui a suscité de nombreuses critiques et qui reflète, même aujourd’hui l’absence de consensus politique sur l’énergie.
Nicolas Sarkozy : audition de l’ancien président de la République – Indépendance énergétique
François Hollande : audition de l’ancien président de la République – Indépendance énergétique