La quatrième semaine du Tournoi des Six Nations s’est révélée déterminante pour la suite de la compétition. Les hommes du XV du Trèfle ont confirmé en Ecosse et se rapprochent d’un Grand Chelem. La Squadra Azzura a perdu les pédales à domicile et se dirige vers la cuillère de bois. Mais l’évènement du week-end reste la leçon donnée par les hommes du XV de France, dans le Temple du rugby : 53 à 10.
De toute l’histoire rugbystique, l’Angleterre ne s’était jamais inclinée chez elle avec un écart aussi grand, toutes compétitions et équipes confondues. Les Bleus ont été dignes d’une équipe du Top mondial et d’un jeu précis, lucide et décomplexé. A l’image des larmes de joie du sélectionneur français, la victoire bonifiée a fait du bien car on le sait, un tournoi avec une victoire contre les Anglais est un Tournoi réussi. Du côté anglais, la défaite fait mal et les défauts sont nombreux. Cette rencontre risque de laisser une trace au fer rouge dans un rugby anglais déjà marqué par plusieurs années de crise.
Le récital historique du XV de France
Le 110ème Crunch s’annonçait compliqué pour le XV de France. Il ne l’a pas été. L’équipe n’avait pas remporté un match dans le tournoi à Twickenham depuis 18 ans et en match amical depuis 2007. A cela s’ajoutait des doutes sur la stratégie de Fabien Galthié depuis la défaite en Irlande et la victoire dans la douleur au Stade de France, qui a coûté le forfait d’Antony Jelonch, cador de la défense des Bleus. Du côté Anglais, malgré la crise vécue il y a quelques mois et la défaite à domicile face à l’Ecosse, on s’attendait à un rebond des hommes de XV de la Rose. La titularisation de Marcus Smith, préféré au taulier Owen Farrell pour débuter la rencontre, et le capitanat du jeune Ellis Genge, devaient symboliser le retour d’une équipe d’Angleterre plus fraîche et victorieuse.
Mais les Bleus ont été tout simplement meilleurs. Bien meilleurs ! Et dans tous les secteurs du jeu. En témoignent les chiffres de la rencontre. Les hommes du XV de France ont ouvert le score dès la 3ème minute de jeu, avec un essai collectif terminé et transformé par Thomas Ramos. Au total, les Bleus ont inscrit 7 essais dont 3 doublés avec un Thibaud Flament écrasant (26 et 57ème minutes), un Charles Ollivon conquérant (41 et 60ème) et un Damian Penaud inarrêtable (72 et 75ème).
Outre les chiffres, on a senti les Bleus bien au-dessus. Collectivement, le XV de France est apparu sûr de lui, dominant sur tous les secteurs de jeu et impitoyable jusqu’aux dernières secondes. Individuellement, les Bleus sont parus en forme olympique, lucides et disciplinés. On peut citer par exemple les prestations individuelles de Thomas Ramos, élu meilleur joueur de la rencontre (83 mètres gagnés, et 8 concrétisations entre les poteaux), d’un Gregory Alldritt des grands moments (75 mètres gagnés pour le troisième ligne), d’un Gaël Fickou magistral en défense (100 % de réussite au plaquage) ou encore d’un Antoine Dupont fidèle à lui-même. Pour son retour en sélection après blessure, Jonathan Danty n’a pas menti : il avait annoncé “être chaud” selon les dires du sélectionneur en conférence de presse. Auteur de 2 grattages, il s’est imposé comme un défenseur redoutable et décisif sur les phases de jeu offensif.
L’absence remarquée des Anglais, sur le terrain comme en dehors
Du côté anglais, les imprécisions et l’incertitude ont dominé le jeu. Que ce soit en mêlée, en touche, sur la conquête, offensivement, défensivement… le XV de la Rose a subi pendant toute la rencontre malgré un certain sursaut au début de la seconde mi-temps, avec un essai à la 48ème. Mais il n’a pas suffi à arrêter le XV du Coq, ni comblé les déficits béants du jeu anglais. L’écart de niveau évoqué par Steve Borthwick, le sélectionneur d’Angleterre, s’est illustré par un jeu désorganisé, inefficace, imprécis et indiscipliné mais surtout l’absence de détermination.
Dans les tribunes, le public de Twickenham, historiquement rempli d’ardeur et de passion, a également raté la rencontre. Dès les premières minutes de jeu, les supporters français présents sur place se sont bien faits entendre, parfois plus que le public anglais. Scène rare dans le Temple du Rugby : ceux-ci ont commencé à se faire remarquer par leur absence à partir de la 70ème minute de jeu, quittant progressivement le stade.
Dans la Nation du rugby, la défaite a provoqué un tollé retentissant et un déluge accablant de la part des médias anglais. Outre-Manche, on parle du “jour le plus sombre” du rugby anglais, d’un match comparable à “un pilonnage, un écrabouillement, une honte” (The Telegraph) et d’une équipe “désastreuse du début à la fin” (The Sun).