1926-1972 : les années du nouveau romantisme
L’exposition qui a ouvert ses portes ce mercredi 8 mars propose une rétrospective sur un courant méconnu du monde artistique. Ce mouvement post-moderne du néo-romantisme, apparu dans les années 20, rejette les formes de l’art abstrait pour se concentrer sur une représentation plus réaliste de la figure humaine et de ses sentiments. Les néo-romantiques s’inspirent de leur environnement et des évènements qui les ébranlent pour créer des oeuvres mélancoliques dont « le chromatisme contenu des périodes rose et bleue [trace] une nouvelle voie face à celles du cubisme et de l’abstraction ».
Influencés au début des années 1920 par le style de Picasso, les néo-romantiques trouvent rapidement une source d’inspiration dans le surréalisme des peintres italiens, notamment Giorgio de Chirico et ses peintures Métaphysiques. Rassemblant de jeunes artistes liés par leur passion pour la peinture, ce mouvement met en lumière les sentiments intérieurs et s’est, jusqu’aux années 1970, exporté non seulement en France mais partout en Europe et aux États-Unis.
Qui sont les néo-romantiques ?
Cette exposition met à l’honneur des peintres variés, français, russes, anglais ou encore néerlandais. Le parcours s’ouvre sur l’oeuvre de Christian Bérard, peintre français également reconnu pour les costumes et décors qu’il créa pour de nombreux films, notamment ceux de Jean Cocteau. Il produit majoritairement des portraits très réalistes, aux visages expressifs et aux couleurs douces, ainsi que des paysages inspirés par les couleurs de l’Italie. Entré à l’Académie Ranson (école d’art fondée en 1908), Bérard y fait la rencontre des futurs membres du courant néo-romantique : entre autres, Pavel Tchelitchew, les frères Berman et Thérèse Debains.
La balade se poursuit avec le peintre russe Pavel Tchelitchew, qui rejoint la France après avoir fui la Russie à la suite de la révolution de 1917. Ses toiles sombres monochromes abondamment recouvertes lui valent d’être reconnu et soutenu par les poétesses Gertrude Stein et Edith Sitwell. Il monte plusieurs expositions en France et aux États-Unis, et son travail évolue rapidement vers des toiles plus abstraites, colorées dans lesquelles certains ont pu voir « la préfiguration de l’art psychédéliques années 70 ».
Quant aux frères Berman, Eugène et Léonide, ils fuirent également la Russie révolutionnaire des années 1910 pour intégrer l’académie Ranson. Eugène Berman, inspiré par Giorgio de Chirico et les paysages d’Italie dont il tombe sous le charme, peint d’abord des scènes urbaines et paysages mélancoliques. Lorsqu’il émigre aux États-Unis durant les années 1930, une rupture s’opère dans son travail. Les couleurs qu’il utilise sont plus vives et saturées et il développe « un nouvel univers fondé sur la transfiguration du paysage américain ». Cette période est également marquée par le suicide de sa femme qui, bien que tragique, donne naissance à une série de peintures mettant en scène une créature mythologique à la chevelure rousse flamboyante qu’il nomme Medusa (voir affiche exposition). La peinture de Léonide Berman est elle plus sombre, sa palette de couleurs variant du gris au marron, à l’ocre et au vert. Il s’inspire principalement du paysage littoral français et couche sur toile des scènes de l’environnement marin. Les deux frères sont restés très liés durant ces années, mais leur style est catégoriquement différent.
La visite s’achève sur l’oeuvre de la peintre Thérèse Debains, figure élusive presque oubliée du mouvement. Elle côtoie les membres de l’Académie Ranson et se lie d’amitié avec Christian Bérard et Léonide Berman. Son travail se concentre majoritairement sur des portraits aux teintes claires, aux visages juvéniles, et des tableaux de fleurs et paysages dont les couleurs pastels évoquent le post-impressionnisme de ses débuts.
Jusqu’au 18 juin au musée Marmottan-Monet de Paris !