Dans le communiqué, la FEI indique désormais qu’il est interdit de filmer ou de diffuser des vidéos sur les réseaux sociaux lors des grandes compétitions internationales par des personnes qui ne détiennent pas les droits. L’institution définit donc avec précision les non-détenteurs de droits des vidéos internationales comme « athlètes et leurs proches (grooms, entraîneurs, agents, famille, etc.), propriétaires, fédérations nationales, officiels et médias accrédités ».
Incompréhension des proches et désinformation du public
Le public n’est pas mentionné dans le communiqué, ce qui soulève des incohérences et suscite des interrogations parmi les proches des cavaliers. Le monopole des vidéos sur les compétitions internationales est désigné dans le guide par “Field of Play (FOP)”, ainsi toutes les vidéos prises et diffusées seront censurées par les droits d’auteur ou par du copyright. Cette FOP comprend « la piste de compétition, la détente, le kiss and cry, les couloirs d’entrée et de sortie de piste, ainsi que le parcours de cross en concours complet et de marathon en attelage », donc jusqu’aux premiers et derniers moments de la compétition, tout appartient à la FEI.
Malgré une publication début février, c’est la presse européenne qui va en faire la découverte et relever des points d’incohérences. La réaction des internautes ne s’est pas faite attendre.
Cette restriction est dans un premier temps partielle. Elle ne s’applique évidemment pas aux concours de club ou poneys que l’on peut pratiquer en loisirs le dimanche matin. Elle s’applique exclusivement aux épreuves de la Coupe du Monde, de la Coupe des Nations et aux grands Championnats Européens. Bien que cette restriction soit partielle, elle reste totale pour les personnes environnantes et plutôt strictes. En effet, d’après la liste des non-détenteurs de droits qui ne sont pas libres de filmer les vidéos des tours, la FEI englobe pratiquement tout le cœur des concours. Cela ne s’arrête pas aux parcours en tant que tel, car cela s’applique aussi aux entraînements, à la détente, et même lors d’une simple balade avant la dite épreuve internationale.
Cette restriction suscite d’abord un débat sur la logique même de l’équitation : Comment peut-on progresser dans sa pratique si l’on n’a plus la possibilité de se voir en action ? Une majorité des entraîneurs estiment indispensable de filmer les cavaliers pour les aider à améliorer leur position, que ce soit au niveau du dos et des jambes du cavalier… ou du cheval ! En effet, l’équitation est un sport où les erreurs peuvent résider dans des mouvements subtils, parfois méconnus des cavaliers avant qu’ils ne les voient sur une vidéo. Ainsi, cette restriction ajoute une contrainte supplémentaire aux cavaliers, allant jusqu’à les priver de la possibilité de revoir leur dernier saut avant de partir en piste.
Dans un second temps, la fédération interdit la publication de vidéos sur les médias sociaux. Cela est contraignant pour les propriétaires lors de conclure une vente, principalement pour les chevaux de sport, car la vidéo du tour en concours est une représentation exacte de comment le cheval se comporte. De plus, cela est contraignant pour les proches. Les grooms, qui sont chargés du cheval, sont aussi chargés de prendre des vidéos du cavalier, car les coachs sont occupés à la préparation.
La FEI impose cette restriction dans le but de maintenir son monopole sur la création et la diffusion des vidéos lors des grands événements. Cependant, cette règle ne concerne pas les photos. Cela soulève la question de comment distinguer entre les deux types de contenu capturé et posté. De plus, quelles sanctions sont prévues en cas de non-respect de cette règle ? Enfin, pourquoi la FEI cherche-t-elle à conserver ce monopole sur les vidéos ?
Censure ou protection de la FEI ?
Pour de nombreux utilisateurs d’Internet, cette mesure est perçue comme une forme de censure et donne l’impression que la fédération a des informations à dissimuler. La “fédé” s’est exprimée sur ses mesures qui “n’ont aucun objectif de censure ni vocation à aller à l’encontre de la transparence” dans la pratique en compétition de l’équitation. La FEI poursuit par “Pour tous ces événements, les droits de captation et de diffusion des images sont vendus à des diffuseurs. Ils possèdent donc les droits exclusifs sur les images et de la retransmission des compétitions à la télévision sur leurs territoires respectifs dans le monde.”, selon la reprise de Horse&Hound. Ces déclarations suscitent toujours des interrogations sur le véritable objectif, étant donné que les compétitions ne sont pas fermées au public, qu’elles sont diffusées à la télévision et qu’elles ne sont évidemment pas fermées aux yeux des entraîneurs…
La FEI justifie cette interdiction en la comparant aux droits de diffusion de la Formule 1 ou des MotoGP, où l’on doit acheter ces droits pour les publier. Cependant, l’indignation du public est en grande partie alimentée par la désinformation : le public peut toujours publier sur les réseaux sociaux, le problème ne concerne que les “proches” des cavaliers. Or, là encore il y a des exceptions.
La FEI distingue trois situations précises pour la capture de vidéos qui sont : la reconnaissance de parcours, la zone mixte et Field of Play, soit le parcours en lui-même. Ajouté à cela quatre groupes de non-détenteurs de droits des vidéos qui sont les médias, les athlètes, les propriétaires et leur entourage ainsi qu’aux fédérations nationales comme la FFE. Le communiqué applique les règles sous ses conditions.
De cette manière, ces derniers ont la possibilité de filmer autant de vidéos qu’ils le souhaitent dans une zone précise qui est uniquement les interviews après la piste. Cependant, une condition règne : ils doivent attendre que les médias se procurent les droits pour les publier par la suite. De plus, ils peuvent également prendre des images pendant les reconnaissances des parcours, mais encore ici, c’est seulement sous réserve d’obtenir l’accord des officiels ou du service de presse de l’événement. Pour le Field Of Play, les médias et l’entourage ne peuvent pas capturer ou publier la moindre image, mais les fédérations nationales peuvent récupérer les passages des athlètes de leur pays, disponibles sur la plate-forme “Socialie”, liée à la FEI. Les athlètes peuvent seulement récupérer leur parcours sur les caméras du concours.
Finalement, il est nécessaire de reconnaître, par exemple, la dangerosité des vidéos de pistes publiées sans aucune réflexion et qui mènent à de l’harcèlement. Dans le guide, la FEI s’exprime sur leur décision par “La politique de la FEI en matière de médias sociaux vise à protéger la communauté équestre, les participants de la FEI, la FEI, ses membres, les athlètes, les officiels et toute personne impliquée dans le sport équestre (…) C’est un outil essentiel à l’ère numérique, où les médias sociaux jouent un rôle important dans l’interaction et la communication. (…) Et sur l’utilisation des médias sociaux de manière responsable, en protégeant leur image et leur réputation personnelles et professionnelles. »
Pour terminer, la FEI reconnaît l’enjeu de traquer toutes les vidéos sur la toile et surtout de les faire retirer. Ainsi, la nouveauté du communiqué de février dernier de la FEI est l’extension à l’entourage sur le statut de non détenteur de droits.