Ce début 2025 n’est guère rassurant pour la santé de la planète : ce 10 janvier 2025, les 1.5 degrés de réchauffement sont dépassés, alors qu’ils représentaient un des objectifs ambitieux des Accords de Paris de 2015. Cette nouvelle est d’une grande gravité, puisque les scientifiques ont longtemps tenté d’alerter sur les risques et les effets du changement climatique, qui vont maintenant devenir une réalité pour de nombreuses personnes. Ce dépassement devrait être à l’origine d’une prise de conscience collective, et d’une mobilisation de masse ; cependant, à la vue de l’actualité politique mondiale, l’écologie ne sera pas, cette année encore, une priorité.
La nomination de Donald Trump à la Maison Blanche pour les 4 prochaines années n’augure que peu de positif, si l’on se fie au bilan de son premier mandat, de 2016 à 2020.
Un enlisement de l’engagement climatique…
Effectivement, depuis l’arrivée de la première administration Trump en 2016, les Etats Unis se sont enlisés dans un statu quo climatique, où chaque Président détricote les mesures prises par son prédécesseur. L’engagement en demi-teinte des Etats Unis au sein des accords internationaux en est notamment le signe le plus flagrant. Les Accords de Paris de 2015, signés par Barack Obama, désapprouvés par Trump en 2017, avant d’être de nouveau rétablis par Biden en 2021, sont à présent de nouveau menacés par Trump qui attend son investiture officielle pour prendre une mesure qui ne risque de rappeler celle de 2017. Ainsi, les Etats Unis renonceraient à leur engagement pour lutter contre le changement climatique, qui consistait à réduire de 50% minimum leurs émissions de gaz à effets de serre et à lutter pour maintenir le réchauffement à moins de 2°C.
De plus, lors de son premier mandat, Donald Trump avait réussi à annuler plus de 208 mesures en faveur de l’écologie prises par Obama. Et il semble déjà déterminé à rester sur la même lancée, mais cette fois-ci avec les engagements de Biden. En effet en 2022 ce dernier avait réussi à faire voter l’Inflation Reduction Act (IRA), qui mobilise 369 milliards de dollars sur 10 ans, dans le but de réduire le coût de la transition écologique et de subventionner les entreprises et les particuliers dans leur transition. Le but clairement affiché de cet Act est de “réduire de 50% les émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2030 par rapport à 2005.” Les mesures pour parvenir à cet objectif prévoient des bonus ou des crédits spécifiques lors de l’achat d’un véhicule électrique ou l’investissement dans les énergies vertes. Bien que Trump ne soit pas encore officiellement Président des Etats Unis, son administration a déjà commencé à se mobiliser pour limiter les effets de cet Act. En effet, sa révocation intégrale reste assez improbable, au vue des avantages économiques qu’il peut procurer au pays, cependant le budget alloué aux crédits et aux bonus sera largement diminué.
… qui favorise le secteur pétrolier
A l’inverse, l’économie de l’énergie pétrolière et du gaz naturel s’est portée à merveille, et correspond largement à l’expression phare de Trump “Drill, baby, drill” (“Fore, chéri, fore”). Alors qu’Obama avait réussi à faire échouer par deux fois le projet Keystone XL, qui prévoyait la construction d’un oléoduc traversant l’Est des Etats unis et le Canada, Donald Trump l’a approuvé deux mois à peine après son investiture en 2017. Heureusement pour les écologistes américains, la nomination de Biden a rapidement coupé court au projet qui fut définitivement abandonné en 2021. Cependant, le projet Dakota Access Pipeline n’a pas connu la même finalité, et cet oléoduc qui traverse verticalement tout le territoire est toujours en activité, malgré les tentatives de procès de l’association Greenpeace.
De plus, c’est sous l’administration Trump que les Etats Unis sont devenus les premiers producteurs mondiaux de gaz naturel, une ressource particulièrement importante sur le territoire américain. C’est au cours de cette même année 2018 que les exportations de gaz et de pétrole ont dépassé les importations. Le pays est devenu le premier producteur de pétrole au monde avec 11,7 millions de barils par jour, devant la Russie et l’Arabie Saoudite. Ce statut de leader dans les énergies fossiles a évidemment conforté le dirigeant américain dans ses investissements dans ce domaine, au détriment du climat.
Un Climatosceptique assumé et bien entouré
“Il fait froid et il neige à New York, nous avons besoin du réchauffement climatique”, “Le concept de réchauffement climatique a été créé par et pour les Chinois afin de rendre l’industrie américaine non concurrentielle” ou encore “le Réchauffement Climatique est une arnaque” sont quelques unes des citations chocs du milliardaire américain, qui n’hésite pas à exposer son opinion quant au changement climatique. Bien que ce dernier reconnaisse un certain réchauffement, il ne considère en aucun cas que ce dernier est dû aux activités humaines et ne reconnait aucuns effets néfastes des gaz à effets de serre sur le climat.
Ce rejet du changement climatique s’intensifie au fur et à mesure que s’aggrave le phénomène, et lors de ce deuxième mandat, le Président semble s’être entouré de personnalités qui ne pourront que suivre sa ligne destructrice. La nomination de l’administrateur de l’EPA (Agence de Protection Environnementale) permet d’évaluer l’hypocrisie de l’administration, autant en 2016 qu’en 2020. En effet, sous les deux mandats de Trump c’est un climatosceptique qui est nommé. En 2016, l’avocat issu des lobbies du pétrole et du charbon, Scott Pruitt, s’est vu attribuer la direction de cette agence, et en 2025, c’est au tour de Lee Zeldin d’être nommé. Ce soutien sans faille au leader républicain tient des propos semblables. Il a affirmé sur X sa volonté de “réaffirmer la domination énergétique des Etats Unis” et pour cela n’hésitera pas à démanteler certaines réglementations environnementales pour “libérer le pouvoir de l’économie américaine”.
Un vent d’espoir des Etats Fédérés ?
Comme le laisse entendre son nom, les Etats Unis restent un Etat fédéral composé de 50 Etats fédérés, dont chaque gouverneur peut établir une politique propre à son bord politique, indépendamment de l’État Fédéral. Ainsi, malgré la nomination de Donald Trump à la Maison Blanche, les gouverneurs des Etats fédérés peuvent toujours s’engager pour le climat. C’est pourquoi il est possible de garder espoir, d’autant plus que déjà lors du premier mandat, certains gouverneurs avaient pris des mesures phares.
We are still in !
Le mouvement “We are still in” est un mouvement de réaction au retrait des Etats Unis de l’accord de Paris en 2017, qui à ses débuts réunissait 9 Etats fédérés (dont la Californie, Washington ou l’Oregon), 125 villes (dont Seattle, New York ou Pittsburgh) et environ 200 entreprises. Ce mouvement maintient des objectifs climatiques semblables à ceux des Accords de Paris. Bien que ce dernier ait été intégré et reconnu sous le mandat Biden, la prochaine nomination de Trump ne pourra que renouveler l’engagement des membres du mouvement.
Les gouverneurs des Etats fondamentalement démocrates, comme l’État de New York, ont mis en place des lois bien spécifiques concernant le climat, et notamment en cette fin d’année 2024. En effet, le 26 décembre, la gouverneure Kathy Hochul a établi un fond de financement de projets écologiques pour la ville de New York, auquel doivent contribuer toutes les entreprises de combustibles fossiles. Le but de cela est tout d’abord de responsabiliser les entreprises, mais aussi de protéger économiquement les new yorkais face aux risques du changement climatique.
Procès à l’encontre des multinationales polluantes
Le gouverneur californien, Gavin Newsome, soutient également une plainte pour “tromperie et dommages” à l’encontre de cinq grandes compagnies pétrolières. Il a la volonté d’agir au nom de son État, la Californie, pour que ces entreprises “rendent des comptes”. La plainte déposée en 2023 fait depuis son chemin dans le système judiciaire et pourra peut-être aboutir à une amende qui pourrait permettre à l’Etat de mieux se relever des catastrophes climatiques auxquelles il est souvent exposé.
Par ailleurs, les incendies qui ravagent la Californie depuis ce 7 janvier 2025 ne sont qu’un rappel constant des risques du changement climatique, et de l’impact destructeur qu’il peut avoir sur n’importe quelle population ou surface du globe. Bien que Donald Trump continue ses critiques, notamment en s’en prenant au gouverneur de la Californie, ou aux pompiers, il ne pourra pas fermer les yeux face aux milliers d’hectares dévastés par ces feux, et sera tôt ou tard bien obligé d’admettre que des feux si violents en plein mois de janvier sont loin d’être naturels.