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Le choix de la répression face à la contestation : où est la limite ?

Depuis plusieurs semaines, la France est plongée dans une crise sociale et politique suite à l’annonce de la Réforme des retraites par le gouvernement. Dans ce contexte, la contestation est de plus en plus forte et la "répression policière" semble s'intensifier ces dernières semaines, au point d’alarmer les instances internationales qui s’inquiètent d’une dérive sécuritaire.

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Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, à Paris, le 5 avril 2023, lors de son audition par la commission des lois de l'Assemblée nationale concernant sa gestion du maintien de l'ordre. © CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP
Répression violente ? La BRAV-M dans le viseur

Depuis le début des manifestations contre la réforme des retraites, la contestation est de plus en plus vive, la répression l’est tout autant pour certains. Les manifestations ont souvent été émaillées d’incidents violents, avec une intervention musclée de la police, plus particulièrement par la BRAV-M (Brigade de répression de l’action violente motorisée), une unité spécifique de la police nationale française. Créée en 2019, lors du mouvement national des gilets jaunes, afin de lutter contre les violences urbaines, elle a à nouveau été largement mobilisée lors de ces dernières manifestations.  

Le 24 mars dernier, le média Loopsider a diffusé des enregistrements de conversations entre des membres de la BRAV-M, dans lesquels ils évoquaient des pratiques violentes et racistes envers les manifestants. L’intervention de l’unité de police pendant la manifestation contre les méga-bassines à Sainte Soline le 25 mars a également été entachée par un recours jugé disproportionné de la force. L’unité de police est dans le viseur d’organisations de défense des droits de l’homme, de syndicats et de partis politiques, qui ont appelé à sa dissolution.

La Brav-M à pied durant la manifestation du jeudi 23 mars, à Paris. © Thomas SAMSON/AFP

Pour autant, la position du ministre de l’Intérieur reste la même, déclarant : « Je refuse de céder au terrorisme intellectuel de l’extrême gauche qui consiste à renverser les valeurs : les casseurs deviendraient les agressés et les policiers, les agresseurs » dans un entretien accordé au JDD le 2 avril. 

Sa rhétorique interroge jusque dans son propre camp lorsqu’il parle de « terrorisme intellectuel » pouvant être jugée inappropriée et dangereuse, disqualifiant d’office toute opposition ; c’est une communication néanmoins assumée par celui-ci. Toutes ces révélations ont intensifié les critiques contre la BRAV-M et ont suscité des demandes de réformes profondes de l’ensemble du système de maintien de l’ordre auxquelles le ministre a dû répondre.

Gérald Darmanin auditionné par la Commission des lois

Le ministre français a été auditionné le 5 avril 2023 par la Commission des lois de l’Assemblée nationale et du Sénat sur la question de la répression des manifestations en France, mais aussi lors des violents affrontements survenus à Sainte-Soline. Lors de son audition, le ministre de l’Intérieur a défendu sa stratégie de maintien de l’ordre tout en écartant d’emblée la possibilité d’une dissolution de la BRAV-M déclarant qu’il s’agit d’une « compagnie d’intervention » faisant usage de motos afin de se déplacer et balayant les accusations à son encontre en maintenant que la réponse violente de l’unité a toujours été « proportionnée ».

Pour aller plus loin : Sainte-Soline : un reportage de « Complément d’enquête » contredit la chronologie officielle sur les violences

Lors de cette même audition, Gérald Darmanin a également été interrogé sur la Ligue des droits de l’Homme, une association française qui a dénoncé à plusieurs reprises la répression policière lors des manifestations. Le ministre a ainsi déclaré que « les subventions données par l’État à la Ligue des droits de l’Homme méritent d’être regardées dans le cadre des actions qu’ils ont pu mener ». Ces propos ont suscité des critiques de la part des défenseurs des droits de l’Homme, qui estiment que la LDH est une association essentielle et importante de la défense des libertés fondamentales et que les subventions de l’État sont nécessaires pour assurer son indépendance. 

 « La seule période où la ligue a été entravée est le régime de Vichy. J’espère qu’on n’y arrivera pas, mais nous avons beaucoup de craintes sur certaines dérives. Elles semblent traduire une bascule du pouvoir vers une droite extrême, ce qui est inquiétant. »

Patrick Baudouin, président de la Ligue des droits de l’Homme.

L’intégralité de l’audition : « Gérald Darmanin : audition du ministre de l’Intérieur sur la Gestion du maintien de l’ordre »

Libertés fondamentales menacées en France ? L’ONU et le Conseil de l’Europe tirent la sonnette d’alarme

Le Conseil de l’Europe et l’ONU ont également exprimé leurs préoccupations concernant la répression en France dans le cadre des manifestations contre la réforme des retraites à l’encontre des manifestants, mais aussi de journalistes. La Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, Dunja Mijatović déclare « Les conditions dans lesquelles les libertés d’expression et de réunion trouvent à s’exercer en France dans le cadre de la mobilisation sociale contre la réforme des retraites sont préoccupantes ». Alors, quelle est la limite à ne pas franchir dans l’utilisation de la force ? 

Le ministre de l’Intérieur est prêt à utiliser tous les moyens pour maintenir l’ordre et si certains saluent sa fermeté et sa défense de la police, cette politique soulève pour d’autres des interrogations quant à la protection des libertés fondamentales ainsi que de la liberté de la presse. Le principe constitutionnel qui doit guider l’action publique en matière de maintien de l’ordre est celui de la nécessité, de la proportionnalité et de l’adaptation de la répression à la situation. 

Dans cette perspective, il devient impératif pour certains de trouver une réponse politique rapide, ainsi que de maintenir un juste équilibre entre sécurité et liberté afin de préserver l’intégrité du système démocratique français.

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