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L’après Jeux Paralympiques, entre rêve et réalité 

Les Jeux Paralympiques de Paris 2024 ont battu des records à bien des égards, à commencer par la médiatisation. Des objectifs remplis et qui surpassent même les attentes. De quoi susciter l’espoir de changements durables dans la vision du handicap. Mais qu’en est-il près de deux mois après la cérémonie de clôture ? 

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75 médailles ont été remportées par la délégation paralympique française. crédits: Freepik
75 médailles ont été remportées par la délégation paralympique française. crédits: Freepik

2,5 millions de tickets vendus pour les Jeux Paralympiques, 75 médailles obtenues par la délégation française… C’est aussi un record absolu pour France Télévision qui comptabilise 49 millions d’auditeurs. En d’autres termes, les Français étaient deux fois plus nombreux à suivre les Jeux Paralympiques de Paris par rapport à Tokyo. 

Un engouement certain, qui a laissé entrer l’espoir d’une société où la prise en compte du handicap est meilleure. Une telle visibilité n’a pu qu’influer positivement sur sa représentation.  

Un soufflé vite retombé en septembre dernier avec la formation du gouvernement de Michel Barnier, où la nomination d’un Ministère du Handicap faisait défaut.

« Ces femmes et ces hommes de courage ont montré leur capacité à faire rayonner notre pays sur le plan sportif. Aussi, face aux nombreux défis à relever pour une meilleure inclusion, je pense que ce gouvernement n’est pas à la hauteur parce qu’il n’y a personne en charge de ce secteur tellement important », avait alors déclaré au micro de la radio Hit West, Yannick Favennec, le député LIOT fraichement reconduit.

Par la suite, une ministre avait été rapidement nommée. Charlotte Parmentier-Lecocq a officiellement hérité du portefeuille, le 27 septembre 2024.

La question du regard des autres

Même si la diffusion record des Jeux Paralympiques a participé à la démocratisation du handicap, les préjugés ont la vie dure. Au terme de près de deux mois de recul, les observations quant à de potentiels micro changements sont nuancées.  

« Cette médiatisation a permis de se faire une idée plus précise de ce qu’est le parasport. Les gens ont pu découvrir des disciplines comme la Boccia, qui n’ont pas d’équivalent chez les valides. Le paralympisme a davantage été pris pour un sport que pour une simple adaptation”, avance Nicolas Lechat, responsable sport adapté au Racing Club Nantais (RCN). 

“Le fait que les Jeux Paralympiques aient bien été représentés et diffusés constitue un gros plus. Mais ça n’a pas forcément de retombées sur le long terme. Pour moi, la mentalité des gens n’a pas du tout changé”, ajoute de son côté Cloé Assati, une étudiante de 19 ans non-voyante et licenciée en para athlétisme au RCN. 

Cette grande visibilité médiatique a aussi pu inciter certaines personnes porteuses de handicap à se lancer dans un sport. Un élan qui n’a pas de prix, sauf peut-être celui des difficultés de terrain qui demeurent. 

Des clubs réticents et un manque de moyens

« Il y a une augmentation du nombre de licenciés en handisport », déclare Nicolas Lechat.

Les envies sont éveillées mais la question des moyens mis sur le terrain peut venir freiner leur concrétisation.

 « Il y a une belle augmentation du nombre de clubs de para athlétisme. Mais de ce que j’observe dans les championnats, beaucoup n’acceptent que les personnes avec un handicap léger ne nécessitant pas d’adaptation. Il y a un manque de moyens humains mais aussi parfois une course à l’élite », relève ensuite le responsable sport adapté.

Et ceux qui développent de véritables sections handisport ont aussi leurs défis à relever au regard des financements. 

« La ville de Nantes nous donne tous les ans la même somme dans le cadre du plan handisport. Il n’y a pas plus de projets qu’avant, ni d’offre supplémentaire au niveau du secteur public. On s’ouvre à tous les handicaps dans la mesure du possible en termes de moyens humains et financiers », complète Nicolas Lechat.

Par exemple, le RCN essaie de développer des actions dans le privé, comme des journées de sensibilisation dans de grands groupes, en contrepartie du versement d’une somme d’argent.

La lourdeur administrative

Même une fois le club trouvé, les tâches administratives constituent encore une difficulté. Quand on souhaite concourir, il peut s’écouler plusieurs mois entre le début des entraînements et l’arrivée en compétition. Pour obtenir une catégorie claire et définie dans le cadre d’une course en sport adapté, il faut que les médecins nomment le handicap.

“ Je souffre d’une maladie qui m’a fait perdre la vue, mais les médecins ne parviennent pas à poser de diagnostique formel sur ce dont il peut s’agir. Tant qu’ils ne passeront pas cette étape, je n’ai le droit à aucune aide de la part de la maison du handicap (MDPH) pour compenser ma situation. Au niveau du sport, je ne peux pas non plus être placée dans une catégorie”, explique Cloé Assati.

En attendant de trouver une issue à ce flou administratif, l’étudiante peut concourir mais aux côtés des valides. Elle n’est donc pas en lice pour les médailles car la présence de son guide est considérée comme une aide extérieure. 

Cette lourdeur administrative s’étend aussi à la vie quotidienne. Le blocage dans la nomination de son handicap fait également obstacle à la reconnaissance du statut d’aidant de sa mère. Elle, qui a arrêté de travailler il y a six ans pour aider sa fille, ne bénéficie d’aucune aide financière.

Cloé Assati et Nicolas Lechat s’accordent pour qualifier la médiatisation des Jeux Paralympiques 2024 de « réussite ». Une réussite qui doit encore s’accompagner de transformations structurelles, si elle veut se traduire de façon durable sur le terrain.

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