La survie du sport russe face aux sanctions internationales

En guerre contre l’Ukraine depuis février 2022, la Russie et la Biélorussie font toujours l’objet de sanctions internationales concernant le sport. Des Jeux de l’Amitié à la Coupe du Commonwealth de biathlon en passant par la sélection nationale de football, tour d’horizon du sport dans ces deux pays d’Europe de l’Est.

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Equipe Russe de Football (AFP pic)

1018ème jour de guerre en Ukraine. Bientôt trois saisons sportives. Dans les deux camps, la guerre n’a pas impacté le sport de la même manière. Côté ukrainien, le conflit a détruit les infrastructures sportives, il a empêché, entre autres, des matchs de Ligues des Champions de se jouer à domicile, et a envoyé des sportifs de haut niveau au front. Du côté de la Russie et de la Biélorussie, le sport s’est davantage résumé à des interdictions de participer aux compétitions internationales.


Les Jeux de l’Amitié pour concurrencer les Jeux Olympiques abandonnés

La bannière des athlètes individuels neutres des Jeux Olympiques avait permis à quinze Russes et dix-sept Biélorusses de se présenter à Paris. Pour un total de 6 breloques au compteur de la petite délégation non autorisée à figurer dans le classement des médailles. Qu’il semblait lointain le temps des JO de Tokyo où les Russes avaient glané 71 médailles dont quatre d’argent en sports collectifs qui leur étaient interdits cet été.

File:2024 BRICS Games opening ceremony 31.jpg - Wikimedia Commons
Cérémonie d’ouverture des Jeux des BRICS à Kazan le 12 juin 2024 (Source : Tatarstan.ru, CC BY 4.0 https://creativecommons.org/licenses/by/4.0, via Wikimedia Commons)

Afin de conserver un attrait sportif au niveau international, la Russie avait accueilli les Jeux des BRICS en juin à Kazan. Avec environ 5000 athlètes de 82 pays, ces Jeux des BRICS n’avaient pas séduit les plus grands sportifs de la planète. Pour faire encore plus fort, Vladimir Poutine annonçait en 2023 son ambition d’organiser des Jeux de l’Amitié en septembre 2024. Seulement un mois après les Jeux Olympiques de Paris, dans l’espoir vain de rivaliser avec le plus grand événement sportif au monde et de lui voler la vedette. Le projet semblait pourtant sérieusement préparé par l’association internationale de l’amitié. Une annonce passée inaperçue le 30 juillet dernier alors que les JO battait leur plein, l’avait reporté à une année ultérieure. Finalement, lundi 2 décembre, le Président Poutine a décrété que ces Jeux de l’Amitié ne verraient pas le jour.


L’équipe nationale de football et ses adversaires

Si certains sports individuels sont aussi touchés, les équipes nationales de sports collectifs sont les premières à pâtir de la situation. C’est notamment le cas de l’équipe nationale de football. Lorsque la guerre s’est déclenchée, la Russie avait toujours l’occasion de se qualifier pour la coupe du Monde 2022 via les barrages et un premier match contre la Pologne. Disqualifiée de cette compétition, « la Sbornaya » a également été interdite de prendre part à l’Euro 2024 et aux Ligues des Nations 2023 et 2025.

Pour continuer à jouer, la sélection russe s’est tournée majoritairement vers des pays asiatiques. Par exemple, elle affrontait le Kirghizistan, le Tadjikistan et l’Ouzbékistan en 2022. Mais aussi l’Iran, le Qatar, l’Irak, le Vietnam et la Syrie. En octobre 2023, la Russie s’exportait hors Asie en jouant contre le Cameroun, le Kenya puis Cuba en novembre. Un point commun à toutes ces équipes nationales : elles représentent des pays alliés de la Russie soutenant plus ou moins ouvertement la guerre en Ukraine. Ce sont aussi des pays où la démocratie est largement compromise. Par exemple, l’Iran et le Tadjikistan se situait respectivement à la 155ème place et à la 157ème place du classement des pays par indice de démocratie en 2023. Pire, la Syrie, dernière équipe rencontrée par la Sbornaya le 19 novembre 2024, était classée dans les cinq pays les moins démocratiques du monde.

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L’équipe de la sélection Russe lors de la Coupe du Monde de Football en 2018 (Source : Антон Зайцев, CC BY-SA 3.0 GFDL, via Wikimedia Commons)

Pas d’équipes européennes voulant s’inscrirent dans ce flot d’adversaires autoritaires… ou presque. Car si l’on exclue la Biélorussie, petite sœur de Moscou, seule la Serbie a accepté d’affronter la sélection russe le 21 mars 2024. La Bosnie-Herzégovine avait, elle, renoncé à jouer son match programmé contre la Sbornaya en 2022 après de nombreuses critiques. Le match Russie-Serbie fait donc exception et pose question sur les relations entretenues entre les deux pays quand on sait que la Serbie est candidate pour son adhésion à l’Union Européenne.

De plus, si ces matchs permettent de ne pas laisser l’équipe nationale russe de football au point mort, ils n’offrent pas une opposition de taille. Pour preuve, sur les 16 matchs disputés depuis le début de la guerre, la Sbornaya n’en a perdu qu’un seul contre l’équipe U-23 d’Égypte. Et sur ses neuf victoires, la Russie n’a pas fait dans la dentelle, atomisant par exemple Cuba 8 à 0 et Brunei 11 à 0. Au total, ce sont 45 buts marqués pour 8 buts encaissés depuis février 2022.

La coupe du Commonwealth de biathlon, alternative à l’IBU

Certains sports individuels ne sont aujourd’hui plus touchés par les conséquences du conflit en Ukraine. Ainsi, les joueurs et joueuses de tennis Russes et Biélorusses, certes toujours représentés par un drapeau blanc, disputent les tournois ATP et WTA sans frein. Cependant, ce n’est pas le cas pour tous les sports individuels et notamment le biathlon car l’International Biathlon Union (IBU) proscrit toujours la participation des Russes et Biélorusses. La saison qui reprenait le week-end dernier est donc la troisième sans eux au départ des courses. Le circuit mondial est privé de biathlètes comme la biélorusse Dzinara Alimbekava, 7ème du classement général de la coupe du monde en 2021 et 2022, ou le Russe Alexander Loginov, 2ème du classement général en 2019 et champion du monde sprint en 2020.

Pour tenter de rester compétitifs lorsqu’ils seront, un jour, réintroduits sur le circuit mondial, les biathlètes russes et biélorusses ont créé, en 2022 et pour quatre ans, la Coupe du Commonwealth. La compétition réunie les sportifs des deux nations sur 6 étapes de début septembre à début avril pour la saison 2024-2025. La coupe du Commonwealth se déroule entre biathlon d’été sur skis-roues et biathlon sur neige avec notamment au programme le site des JO de 2014 à Sotchi. Lors de la première étape, c’est le couple biélorusse Dzinara Alimbekava et Anton Smolsky qui avait gagné quatre des six courses. En parallèle, les biathlètes russes peuvent également s’affronter sur la coupe de Russie et les championnats de Russie afin de densifier le programme de l’hiver.

Mais en plus de porter un nom étrange, cette coupe du Commonwealth est très peu médiatique contrairement à la coupe du monde de l’IBU qui passionne chaque année davantage. Enfin, à l’image du football russe, la coupe du Commonwealth ne permet pas aux Russes et Biélorusses de tester leur niveau contre le gratin mondial du biathlon. Et comme si le biathlon russe n’était pas déjà mal en point, la seule exposition médiatique dont elle a bénéficié ces dernières semaines fut la médaille d’or des JO de Vancouver retirée au russe Evgeny Ustyugov pour cause de dopage, au profit de Martin Fourcade.

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