La précarité étudiante, de quoi s’agit-il exactement ?
« 56% des étudiants ne mangent pas à leur faim », « un étudiant sur trois, vit dans un logement précaire ». Ces propos relayés dans les médias dénoncent une précarité étudiante grandissante. Selon TF1 info, la hausse des produits alimentaires atteint 11.8% en octobre sur un an. Dans un contexte d’inflation (6%), les prix influencent la vie des étudiants. L’observatoire de la vie étudiante annonce que le logement constitue une part importante des dépenses (57%). Il évoque également que le domaine de la santé est évité par les étudiants, une dépense ponctuelle trop chère pour certains. Il ne s’agit pas du seul domaine touché, l’alimentation également. C’est le constat que font plusieurs associations comme le secours populaire français ou encore les épiceries solidaires. Leur fréquentation est en constante hausse. « Il faut arriver en avance » : 400 étudiants font la queue pour recevoir de la nourriture, ce titre d’une vidéo du Parisien datant du 5 novembre 2021, souligne le même phénomène.
80% des étudiants travaillent en France à côté de leurs études. Parmi eux, 40 000 étudiants selon le syndicat sud-étudiant, essentiellement des étudiantes gagnant leur vie en se prostituant et/ou avec une activité d’escort. Selon la chercheuse Anne-François Déquiré, il s’agit d’une activité permettant de rassembler en moyenne 150 euros par heure. Cette prostitution aux allures discrètes se passent à travers des sites d’escort et des petites annonces afin d’éviter les réseaux de proxénètes. La chercheuse évoque qu’il s’agit d’un avantage financier car les étudiantes touchent des sommes plus élevées, contrairement au revenu d’un travail étudiant. Eva Clouet auteure de La prostitution étudiante, décrit les étudiantes issues de milieux populaires ou de classe moyenne comme les plus touchées. Elle met en garde sur la difficulté de sortir de ses pratiques, avec une accoutumance et un aspect de cercle vicieux.
Maëlle, un appel à l’aide ?
Maëlle a 20 ans et étudie à Science Po en quatrième année. Ses parents vivant à Mayotte ne disposent pas de revenus suffisants pour subvenir aux besoins de leur fille. Sa mère est fonctionnaire et son père est au chômage. Sur l’île, le salaire de sa mère bénéficie d’une compensation due à l’augmentation des prix. Cependant, cette augmentation se répercute sur la bourse de sa fille qui se voit diminuer d’année en année. Elle recevait une bourse de 396 euros au début de ses études puis de 100 euros depuis la rentrée de septembre 2022. Touchée par la vidéo de la jeune Maëlle, une étudiante ouvre une cagnotte, récoltant 14 000 euros en une journée.
Face à l’ampleur de la vidéo devenue virale, quelles réponses médiatiques et politiques ?
Relayée par les réseaux sociaux et par certains médias, elle n’a pas manqué de faire réagir les différents acteurs de l’échiquier politique. Sylvie Retailleau ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche répond sur son compte Twitter le lendemain de la publication de la vidéo TikTok. La déclaration de la ministre souligne : « une revalorisation des bourses à hauteur de 4%, aide de rentrée de 100 euros, augmentation des APL, gel des loyers Crous et le maintien du repas à 1 euro pour les étudiants précaires ». Le député Insoumis rallié au groupe de la NUPES, Louis Boyard a alors tenu une allocution à l’Assemblée nationale. Le député dénonce les actions du gouvernement, ne prenant pas en compte l’augmentation des prix des loyers, de l’inflation… Il annonce un projet de loi pour le 24 novembre visant à « éradiquer » la précarité étudiante.
La précarité étudiante touche la jeunesse depuis plusieurs années. Les mesures prises par le passé semblent ne pas endiguer l’augmentation du nombre d’étudiants faisant la queue depuis le secours populaire. Depuis que le jeune Anas se soit immolé à Lyon en 2019, nombre de syndicats étudiants se mobilisent contre la précarité. C’est notamment le cas à Lille, où les syndicats ont manifesté devant la faculté, il y a quelques jours de cela. Un aspect non-abordé qui pourrait être questionné, est celui de la psychologie d’une jeunesse confinée dans 20 mètres carrés, qui aurait le sentiment d’être délaissée, par ceux qui disent pourtant, en faire tant pour elle.