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Iran : une vague d’empoisonnement qui cherche son coupable

Est-ce la goutte de trop en Iran ? Alors que le pays traverse une période de troubles politiques et sociétaux depuis Novembre dernier , une série d’empoisonnement d’écoles de filles vient rajouter une page à l’indignation populaire. Mais les auteurs des faits sont pour le moment inconnus.

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"Empoisonnement" © DESSIN DE RAMSÉS, CUBA.
Des empoisonnements à la pelle

Cela fait plusieurs mois que le pays est traversé, outre les revendications sociales, par une vague d’empoisonnements dans les écoles de filles.

Au total ce seraient près de 1200 jeunes filles (selon des chiffres du Guardian) qui auraient été touchés par des empoisonnements dans leurs écoles. Mais le phénomène reste difficile à quantifier clairement, toutes les jeunes filles n’ayant pas été hospitalisées, ou signalées. La vague d’empoisonnements n’est pas localisée puisque des cas ont été recensés dans 25 des 31 provinces du pays.

Les intoxications seraient dues à des gaz inhalés par les jeunes filles au sein même des établissements scolaires. Comment les ont-elles ingéré ? Comment les gaz sont-ils entrés dans les écoles ? Pour le moment pas de réponses. Une chose ressort pourtant, les gaz seraient, selon les sources, d’origines militaires. Mais là encore le flou règne et l’origine de ce gaz reste inconnue.

Ce qui est sûr c’est que l’inhalation de ces gaz entraîne une série d’hospitalisations. Les élèves sont prises de maux de tête, de difficultés respiratoires et d’étourdissements. Le 28 février par exemple, une école de Khayam dans la ville de Pardis à l’Est de Téhéran a été la victime de ces empoisonnements. 35 élèves, toujours des jeunes filles, ont dû être hospitalisées.

Heureusement pour l’heure, aucune victime n’a été mortellement impactée par les gaz.

Ces incidents pourraient en rester là s’ils ne survenaient pas dans un contexte si particulier en Iran.

Dans un contexte social déjà tendu

Le pays est traversé par une vague de contestations suite à la mort de Mahsa Amini, le 16 septembre dernier (lire aussi Iran : Ces femmes à la recherche de liberté). Ainsi, les empoisonnements font monter un peu plus la colère de la population. De nouvelles manifestations ont donc éclaté devant des grands centres de pouvoir, pour protester contre l’inaction du gouvernement.

Elles se sont concentrées à Qom, première ville impactée par les empoisonnements, et lieu de pouvoir des dirigeants religieux de l’Islam chiite. Pour la plupart, ce sont les parents des victimes qui dirigent les manifestations, mais une partie des opposants politiques rejoignent évidemment les rassemblements. Même les jeunes filles se révoltent devant les écoles.

Outre le mécontentement de la population qui persiste, c’est bien la peur qui s’installe. De nombreuses mères de familles redoutent de renvoyer leurs filles à l’école. On craint de nouvelles intoxications.

Mais qui est responsable de ces incidents ? Plusieurs pistes sont ouvertes. Ainsi, une implication du gouvernement n’est pas exclue, bien au contraire.

Une femme peinte en rouge lors du rassemblement à Barcelone, en Espagne, le 4 octobre 2022. Des manifestations ont eu lieu à travers le monde après la mort de Mahsa Amini, mi-septembre. — Davide Bonaldo/Sipa USA/SIPA
Le gouvernement grandement mis en cause  

Dans un message publié le 7 Mars par la radio Farda, Zahra Rahnavard, assignée à domicile depuis un an pour être une des leaders de l’opposition déclare que « les dirigeants se vengent des lycéennes et des étudiantes qui ont participé au Mouvement « Femme, Vie, Liberté » contre le voile obligatoire et la tyrannie ». Les opposants au régime voient bien entendu cette série d’empoisonnements comme un moyen du gouvernement d’instaurer la peur dans la population. Mais ils ne sont pas seuls et cet avis est partagé par un grand nombre d’experts de l’Iran.

Parmi eux, l’organisation Iran Human Rights qui dénonce la complicité de l’État dans les incidents.

Au départ pourtant, les soupçons se portaient sur des extrémistes de droite. Il était question d’une volonté de mettre fin à l’éducation féminine, perçue comme « contre nature ». L’hypothèse s’est vite effacée au profit d’une complicité étatique.

Comment réagit alors le gouvernement face à ces accusations ? Comment se placent les instances internationales pour gérer le problème ?

Les réactions des instances

Le gouvernement a mis du temps à réagir, ce qui lui est évidemment reproché par une grande partie de la population, mais il a réagi. Là encore, plusieurs pistes étaient évoquées à commencer par l’implication de groupes terroristes. Parmi lesquels les Moudjahidines du MEK. Depuis, le ministère de l’Intérieur a en effet indiqué que « Plus de 100 personnes soupçonnées d’être responsables des incidents dans les écoles ont été identifiées, arrêtées et interrogées ». Mais pour le moment, aucune indication n’a été donnée sur l’identité de ces personnes.

Ces arrestations suivent les propos de l’ayatollah, qui avait demandé le 6 mars à ce que des « peines sévères » soient adressées aux auteurs des faits. Sanctions allant jusqu’à la peine de mort, encore en vigueur en Iran. Le Vice-ministre de l’Intérieur, Majid Mirahmadi accuse, quant à lui les auteurs « de vouloir fermer les écoles » mais aussi de vouloir raviver la flamme des émeutes.

Au niveau international, le Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme a demandé l’ouverture d’une enquête sur les empoisonnements. De plus, les experts des Nations Unies ont pointé du doigt l’inaction du gouvernement face au problème, en déclarant le 16 Mars « Alors que des arrestations viennent d’être annoncées, nous restons gravement préoccupés par le fait que, pendant plusieurs mois, les autorités de l’État non seulement n’ont pas enquêté rapidement sur ces attaques, mais les ont niées à plusieurs reprises jusqu’à une date récente ».

Si le flou persiste autour des auteurs, des arrestations et des véritables origines de ces empoisonnements, une chose est sûre. Cela vient ajouter de l’huile sur un feu déjà brûlant en Iran.

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