L’écocide, une arme de guerre moderne
L’invasion russe de l’Ukraine le 24 février 2022 a su marquer les esprits par sa violence. En effet, l’avancée des troupes russes s’est accompagnée de crimes de guerres multiples tels que des déportations, des attaques sur civils ou bien encore des meurtres et actes de tortures. Non seulement cet évènement a eu des conséquences terribles sur le pays au niveau des infrastructures et de la population. Mais il impacte aussi drastiquement l’environnement de nos jours et pour les décennies à venir.
Pour ce conflit, comme pour beaucoup d’autres, la menace de la biodiversité est utilisée comme une arme. Les tensions au sujet de la centrale de Zaporijjia en est un exemple. Depuis mars 2022, le territoire est occupé par les forces armées russes qui refusent toute demande de démilitarisation de la zone. Endroit stratégique situé à seulement 550 mètres de la capitale ukrainienne, la centrale représente un réel moyen de pression. Même si les réacteurs de la centrale sont à l’arrêt, le cœur de celle-ci doit être contrôlé et nécessite une alimentation électrique continue. Si l’alimentation venait à être coupée, la fusion du cœur de la centrale entraînerait de multiples rejets radioactifs. Ceux-ci pourraient impacter la santé de la population ainsi que la faune et la flore de la zone à une échelle encore inconnue. C’est pourquoi les villes voisines ont été évacuées par crainte de catastrophe nucléaire.
La récente destruction du barrage hydroélectrique de Kakhovka dans la nuit du 5 au 6 juin 2023 n’a fait qu’accentuer les conséquences dramatiques de la guerre sur l’environnement. Convoitée par les deux camps, la destruction du barrage était envisagée par les Ukrainiens pour stopper l’avancée russe. Du côté de Vladimir Poutine, cette destruction aurait pu être vu comme un sabotage en faveur de la Russie.
Bien que les forces opposées s’accusent, personne n’a été reconnu coupable de cet incident puisqu’il impacte négativement les deux côtés. Les conséquences restent tout de même catastrophiques : plusieurs morts et une population forcée à quitter le territoire en Ukraine mais aussi en Crimée. En effet, les inondations ont détruits les infrastructures et logements. Les terres sont inondées et devenues toxiques à cause des explosions. Qualifiée de pire catastrophe depuis Tchernobyl par Ostap Semerak, ancien ministre ukrainien de l’Écologie, cet incident est loin d’être le premier. Pourtant, tous dégradent l’environnement à grande échelle, et parfois, de manière irréversible.
Pour plus d’informations sur les impacts environnementaux dus aux offensives sur le territoire ukrainien : https://maps.greenpeace.org/maps/gpcee/ukraine_damage_2022/?_ga=2.168698593.132423062.1687272158-868401061.1686228765
Des écosystèmes dévastés par la guerre
En somme, le fait de cibler des infrastructures liées aux substances toxiques constitue un levier d’influence durant un conflit. Seulement, ces zones ne sont pas les seules à représenter des points stratégiques d’emprise. Aujourd’hui, 40% du territoire est miné par des champs de mines ou des bombes qui n’ont pas explosé. Surnommé le pays des champs sans fin, les terres agricoles ukrainiennes sont aujourd’hui encombrées par des mines. Alors posées lors de l’invasion de certains territoires comme celui de la région de Kharkiv par les Russes, elles représentent un grand risque pour la population. Depuis la prise de territoire des forces ukrainiennes, les agriculteurs cherchent à reprendre leurs affaires. Ils travaillent donc sur ces terrains minés extrêmement dangereux.
En outre, l’eau, les sols et l’air sont gravement impactés. Les substances générées par les incendies et les explosions ont fortement pollués le territoire et affectent la santé de la population. L’Ukraine qui avant le conflit abritait un tiers de la biodiversité de l’Europe est désormais assailli par la pollution. Les écosystèmes gravement endommagés ne peuvent déjà plus abriter certaines espèces de la faune et la flore ukrainienne.
De telles conséquences environnementales risquent d’impacter les futures générations pendant des décennies. Il en est de même pour la Crimée, victime des offensives du géant de l’Est. Elle risque de subir des conséquences environnementales irréversibles.
La guerre en Ukraine a marqué un tournant décisif concernant l’avancée mondiale dans la transition écologique. Que ce soit dans les pays alentours ou bien dans toute l’Europe. En outre de la crise énergétique, ce conflit impacte aussi la transition environnementales européenne. Les besoins en énergies poussent certains pays européens à importer du Gaz Naturel Liquéfié (GNL) pour pallier au manque de gaz. Cependant, celui-ci émet deux à trois fois plus de dioxyde de carbone qu’un gazoduc classique. Certains pays tels que les Pays-Bas ont relancé leurs centrales électriques utilisant du charbon.
Une volonté de reconstruction en phase avec la transition écologique
Dénoncés à multiples reprises par Volodymyr Zelensky, les écocides commis par la Russie ne sont aujourd’hui pas reconnus par le droit international. Depuis le début de l’Invasion, l’Ukraine a pourtant recensé plus de 2 400 crimes contre l’environnement. Le pays cherche à inculper Vladimir Poutine et ses alliés, sans succès. Cependant, ce crime a été récemment reconnu par le Parlement européen et promet une avancée du droit pénal international. Kiev souhaite obtenir des dédommagements pour ces dégradations qui s’élèvent a plus de 50 milliards de dollars.
Il est donc primordial de réparer ces dégâts. L’objectif est de reconstruire les infrastructures ukrainiennes pour qu’elles soient résistantes aux attaques tout en préservant l’environnement. De par l’installation d’énergies propres, les ONG présentes sur le territoire telles que Greenpeace, cherchent à diminuer le coût tout en minimisant l’impact environnemental. En partenariat avec l’Union Européenne, la Norvège et autres institutions ou encore la Suisse, se sont engagée à reconstruire l’Ukraine par des investissements privés.
Ainsi, ce conflit a freiné l’avancée du processus de transition environnementale. Cependant, peut-on parler d’un recul de cette transition? Certes, les récents évènements ont prouvé que sans paix, une avancée pour l’environnement est difficile. Néanmoins, certains acteurs en faveur du climat envisagent des solutions de transition par temps de guerre. En première ligne, le président Volodymyr Zelensky rappelle l’urgence climatique. La COP28 prévue du 30 novembre au 12 décembre 2023 à Dubaï est symbole de contradictions mais représente tout de même un espoir pour une avancée climatique effective.
Il ne peut y avoir de politique climatique efficace sans paix sur la Terre
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky lors d’un discours prononcé à la COP27.