Tout d’abord est ce que vous pouvez vous présenter ?
Je m’appelle Emma Fourreau, j’ai 22 ans et j’étudie en science politique et en droit de l’environnement (Science po Rennes campus de Caen). Je suis en master génération future et transition juridique.
Pourquoi la politique et pourquoi avoir choisi le parti de La France Insoumise ?
Au départ je ne connaissais pas LFI, je viens d’une famille qui n’est pas très politisée qui votait PS ou Europe Ecologie Les Verts, je ne connaissais donc que ces partis là. Néanmoins je m’intéressais beaucoup à la politique et mais je ne trouvais aucun parti qui me correspondait vraiment.
Un jour en première L, une classe a fait un test politique avec leur prof d’histoire, par conséquent je l’ai fait aussi et je suis tombée sur LFI en premier et c’est comme ça que j’ai découvert que ce mouvement existait.
Je suis allée creuser sur YouTube, regarder les vidéos de Jean-Luc Mélenchon et je me suis rendu compte que c’était mes convictions politiques parce que j’ai été engagée assez jeune dans les questions environnementales et celles du droit des animaux, et naturellement je me suis dit le parti qui allait me correspondre le plus était « Europe écologie les verts ». Mais je ne les trouvais pas assez radicaux alors qu’au contraire LFI faisait le lien entre les questions écologiques et celles d’ordre social qui sont pour moi très importantes. En effet, on ne peut pas faire d’écologie « punitive », au détriment des plus pauvres et des classes populaires.
J’ai alors rejoint le mouvement en 2017.
Quel est ton rôle au sein du mouvement ?
Je suis Co-animatrice des Jeunes Insoumis au niveau national et ceux de Caen également. Être animateur, c’est faire en sorte qu’il y ait une dynamique au sein du groupe d’action, tant du point de vue local (porte à porte, tractage, collage) mais aussi organiser des parties de football dans les quartiers populaires et discuter avec les parents etc. Le but est de faire de la politique de manière alternative et utiliser tous les biais possibles : le sport, la culture parce que tout est politique.
Le but est donc d’avoir un maximum d’impact.
Pour toi, qu’est ce que la Franc Insoumise, ses objectifs et enjeux ?
LFI est parti du constat que le parti n’est plus vraiment adapté à notre époque, c’est pour ça que nous sommes un mouvement, nous n’avons pas de cartes d’adhésion ni de cotisation ce qui amène à une forme beaucoup plus libre d’engagement. On peut venir et revenir. Le but est de fédérer un maximum de gens plus facilement.
Nous sommes nés suite à la trahison du PS, du fait que le PS ait trahi le socialisme. C’est sur les cendres du PS que nous nous sommes bâtis mais en nous en détachant malgré tout. Il n’y a plus rien de gauche au PS aujourd’hui, par exemple Anne Hidalgo est pour la retraite à 62 ans alors que c’est Sarkozy qu’il l’avait mise en place.
C’est pour cela que la France Insoumise est là pour représenter ces classes populaires, pour tous les gens qui ne se reconnaissent pas dans les partis traditionnels.
Comment vous situez vous sur l’échiquier politique ?
On dit gauche radicale, l’extrême gauche existe mais c’est plutôt Philipe Poutou (NPA). Nous, on participe au jeu électoral, c’est un programme de transition.
On prend les problèmes à la racine, comme celui du capitalisme, qui engendrent trop de pauvreté en France alors que nous sommes la 6e puissance mondiale ; on a 300 000 SDF ; 8 millions de personnes qui vivent grâce aux aides alimentaires.
Nous sommes là pour défendre les intérêts du peuple. La fracture, c’est les 1% les plus riches contre le reste.
L’objectif pour LFI est de mettre à terme les inégalités et injustices. Les riches ne font que s’enrichir tandis que les pauvres s’appauvrissent. Quand tu traverses la rue on n’a pas un emploi mais un sdf par terre qui dort. On a trois millions de logements vacants en France, c’est un vrai problème politique, Macron n’a pas tenu ses promesses.
Pour les présidentielles quels sont vos objectifs ?
Il faut d’abord gagner. Les autres partis de gauches sont en dessous de 5%. LFI y croit vraiment et le but est de faire venir tous les abstentionnistes. Il y a une réserve de voix chez eux mais ces derniers sont déçus de la politique et on les comprend. On veut vraiment aller vers eux.
Le problème aujourd’hui c’est l’abstention, donc on va aider les gens à s’inscrire sur les listes électorales (10 millions de personnes en France).
Ensuite il faut expliquer aux gens qu’ils ont été trahis par la gauche et la droite, mais qu’avec LFI ils ne pourront pas être déçus grâce à la révocation des élus qu’on va mettre en place.
Si un certain nombre de personnes se demandent s’il faut garder Jean Luc Mélenchon, il y aura un referendum, c’est un garde-fou. Si les gens sont élus pour un programme et qu’ils ne le respectent pas : ils pourront sauter. Sous la Ve république, le peuple vote tous les 5 ans. Ce n’est pas suffisamment démocratique.
C’est pour cela qu’on veut passer à la VIe république.
Dans les sondages, on retrouve cinq candidats à plus de 10%, comment vous abordez la chose ? Comment réagissez-vous par rapport aux sondages ?
La France qui vote est de droite, l’intérêt est donc d’aller chercher les abstentionnistes qui sont principalement issus des classes populaires. Un président qui gouverne un peuple qui n’est pas allé voter aura forcement moins de légitimité. On considère que la démocratie doit être revitalisée et pour cela tout le monde doit aller aux urnes.
On regarde forcement les sondages, nous sommes en tête des partis dit de gauche ce qui montre qu’il y a une dynamique de son côté. La stratégie de notre côté est donc payante : parler à tout le monde et non pas qu’au peuple de gauche.
Qu’avez-vous pensé de la primaire populaire ?
Le problème de cette primaire était qu’elle n’était pas populaire, les gens qui ont voté étaient politisés. Les gens des quartiers populaires ne vont déjà pas aux « vraies » élections alors là…
Lorsque l’on voit les gens qui faisaient la promotion de la primaire populaire, il s’agissait de personnes qui avaient soutenu EM en 2017, et qui se posent alors en donneur de leçons : c’est de l’hypocrisie.
Jean-Luc Mélenchon est le seul à prévoir un programme spatial, est ce que vous pouvez nous en dire plus ?
Il parle des dernières frontières de l’humanité, normalement il y a eu un traité sur l’espace pour que ça reste un domaine qui n’appartienne à aucun Etat. Cependant, on voit des velléités de certains pays comme les USA qui vont essayer de s’emparer de l’espace. Nous sommes là pour dire que c’est un bien commun, cela a des enjeux en termes de pollution, même de télécommunication. C’est une zone très stratégique mais qui doit rester dans le giron de tous les pays avec une gestion commune.
C’est également un des seuls à inscrire l’écologie dans la Constitution, avec la règle verte, est ce que vous pouvez développer ?
La règle verte c’est : on ne prend pas plus à la Terre que ce qu’elle peut reconstituer en 1 an. C’est vraiment l’idée que toutes les politiques publiques doivent garder en tête. Elle est là pour guider l’action publique. L’écologie n’est pas qu’un simple domaine, cela doit devenir un fil conducteur prochainement.
C’est à l’Etat de prendre en charge cette question.
On parle de planification écologique, sortir de ce modèle productiviste.
Il faudrait sortir du nucléaire également car c’est une énergie qui est très dangereuse. La question des déchets, on ne sait pas la traiter aujourd’hui, Greenpeace a montré les failles présentes.
On sait que les cours d’eau vont s’assécher sauf qu’on a besoin d’eau pour refroidir la centrale et donc cela pose des problèmes de sécurité. S’il y a des dégâts, cela sera à la hauteur de 100%. Il faut donc planifier la sortie du nucléaire.
Par rapport à l’actualité il y a eu récemment le convoi de la liberté, comment s’est positionné LFI par rapport à ce mouvement ?
Nous y avons prêté beaucoup d’attention, nous ne rejetons pas l’initiative populaire. C’était beaucoup de solidarité et d’entraide.
Avant les gens se cachaient lorsqu’on a du mal à joindre les deux bouts. Mais aujourd’hui, on peut le dire. On est donc là pour les soutenir, plus personne n’aura honte. Restaurer la dignité de chacun, c’est notre mesure principale à travers plein de propositions.
Jean-Luc Mélenchon veut une police de proximité, qu’est-ce que cela donnerait ?
On ne veut pas instaurer de rapport de force avec la police, aujourd’hui le seul rapport c’est la violence et la crainte. La police n’est pas censée protéger un ordre établi mais les citoyens. On a une police qui protège l’ordre capitaliste, qui est là pour que le pouvoir d’Emmanuel Macron reste en place, quitte à être dans une répression terrible (mains arrachées, yeux crevés). Il y a même des gens qui ont perdu la vie comme Zineb Redouane.
Rétablir l’ordre, c’est rétablir une confiance entre la police et la population. Instaurer un dialogue de confiance. On veut donc aller vers la désescalade.
La position de la France à l’international ?
On veut une politique altermondialiste. En d’autres termes, on souhaite être non aligné et proposer une troisième voie avec les pays qui ne se reconnaissent pas dans la politique des USA ou de la Chine. On fera respecter les intérêts de la France.
Être indépendant et donc quitter l’OTAN est un objectif. On veut travailler avec l’Afrique en se détachant de la vision coloniale et notre propre impérialisme. La France-Afrique, c’est encore le pillage des ressources africaines.
Qu’avez-vous pensé de l’initiative de CS actu d’être venu vous contacter ?
Cela fait plaisir de répondre à des questions de jeunes et pas à de gros médias comme ceux détenus par Bolloré dont les questions sont plutôt biaisées et à charge. Se dire que l’on peut dérouler sa réponse est vraiment agréable et productif.
Pour aller plus loin voici une vidéo d’HugoDecrypte sur le programme de Jean-Luc Mélenchon.