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Faire des économies sur la situation de l’hôpital public français, vraiment ?

Le premier ministre Michel Barnier a porté son choix sur l’hôpital Necker pour son premier déplacement officiel, le 7 septembre dernier. Alors que la Fédération Hospitalière de France, représentante institutionnelle des hôpitaux, demande une augmentation de 6% du budget pour l’année 2025, Michel Barnier a, devant les micros qui lui étaient tendus, prononcé une phrase controversée, appelant à “faire des économies”. Qu’en est-il de la situation réelle de l’hôpital public ?

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Comment l’hôpital public est-il financé ?

Depuis 2004, dans le cadre du plan “Hôpital 2007”, c’est la tarification à l’acte – autrement appelée T2A – qui devient le mode de financement unique de l’hôpital public, puis de l’hôpital privé en 2005. Elle repose sur la mesure et l’évaluation de l’activité des établissements, ce qui détermine les ressources allouées.

Toutefois, d’autres missions des établissements publics sont financées par les missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation (Migac). Elles sont divisées en deux catégories : les missions d’enseignement, de recherche, de référence et d’innovation (Merri) et les autres missions (vigilance et de veille épidémiologique, veille sanitaire, prévention et gestion des risques, etc).

Une situation alarmante et régulièrement pointée du doigt

Depuis plusieurs années, dans le débat public, les deux mots qui reviennent le plus régulièrement pour décrire la situation de l’hôpital public français sont : “en crise”. Symptômes des politiques successives à orientation libérale, les restrictions budgétaires, la fermeture des lits ou le manque de personnel sont autant de facteurs pointés du doigt.

Comme le rappelle dans un témoignage Théo, étudiant en soins infirmiers, 60.000 postes d’infirmier.es sont actuellement vacants au sein de l’hôpital public. Les nombreux départs en retraite, non palliés par une quantité suffisante de recrutement de nouveaux infirmier.es et aides-soignant.es, ainsi que la dégradation progressive de leurs conditions de travail, entraînent une baisse du nombre de soignant.es par patient. Ainsi, les ratios infirmier.es / patients sont le double des normes officieuses ; il faut normalement compter environ 6 à 8 patient.es par infirmier.e selon les pathologies. Au sein de l’hôpital public, selon l’Agence Nationale d’Appui à la Performance des établissements de santé et médico-sociaux, il est tout à fait possible d’observer un.e soignant.e pour 12 à 14 patient.es le jour. Chiffre qui peut s’élever à un.e soignant.e pour 30 patient.es la nuit.

Corollaire du manque de personnel et des difficultés à le recruter : les conditions de travail, qui ne cessent de se dégrader. De très nombreux récits témoignent d’heures supplémentaires imposées, de rappel sur jours de repos, de congés fractionnés, ou encore de déplacements forcés entre services. En conséquence, les burn-out se multiplient chez les soignant.es ; 10 % sont en arrêt maladie, et ce chiffre tend à progresser de nouveau pour les prochaines années.

Un manque de reconnaissance reconnu parmi les soignant.e.s

Les conditions de travail dégradées s’accompagnent également d’un manque de reconnaissance, exprimé par les différents personnels soignants. Malgré une éphémère mise en avant durant la pandémie de COVID-19, aucune amélioration significative n’est à noter dans ce domaine. Selon cette étude réalisée par la DREES, portant sur les conditions de travail du personnel hospitalier durant la pandémie de COVID-19, il est constaté que peu de personnes considèrent que leur travail est reconnu. Plus des trois quarts des personnes interrogées déclaraient en effet ne pas ressentir plus de reconnaissance envers leur travail qu’avant la crise.

À ces différents problèmes s’ajoute la fermeture croissante du nombre de lits d’hôpital. Selon ce rapport de la Cour des comptes, 8.100 lits d’hôpital public ont été supprimés entre 2013 et 2019. Plus largement, selon les données de la DREES, ce sont près de 80.000 lits d’hôpital qui ont été supprimés depuis 2000, certains départements, parfois de faible densité médicale (Sarthe, Creuse, Ardèche, etc) ayant même, pour certains, vu leur nombre de lits divisé par deux.

La dégradation progressive des conditions de travail, la suppression de moyens humains et financiers, ainsi que la hausse du sentiment de déconsidération, sont autant de facteurs aggravants d’une baisse de la qualité des soins. De très nombreux acteurs du système de soins alertent sur cette situation depuis des années, réclamant une hausse des moyens et non des coupes budgétaires. Autrement dit, nous sommes face à un problème urgent et concret sur lequel le Premier ministre et son futur gouvernement devront se pencher sans plus attendre.

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