« Une fête en décalage avec la réalité politique dans laquelle nous sommes« , Sandrine Rousseau. « Ceux qui ont fêté la mort de Jean-Marie Le Pen sont les mêmes qui dansaient le 7 octobre« , Marion-Maréchal Le Pen. « Rien ne justifie de danser sur un cadavre« , Bruno Retailleau. À droite, à l’extrême droite et même en partie à gauche, on s’indigne des scènes de liesses des apéros géants, des fêtes organisées suite à la mort de Jean-Marie Le Pen, le 7 janvier 2025. Entre réactions spontanées et indignation, la France s’est divisée en deux camps.
Un personnage haï
Il est vrai, condamné à plus de 25 fois pour apologie de crimes de guerre, provocations à la haine et à la discrimination, antisémitisme ou encore pour des injures publiques, Jean-Marie Le Pen est un homme politique plus que controversé qui s’est attitré la haine de nombreux français. Cela se confirme encore un peu plus après son décès. « Ce sale raciste est mort« , « La jeunesse emmerde toujours le Front national » et j’en passe peut-on lire sur de nombreuses pancartes. De Paris, à Rennes en passant par Angers, Bordeaux ou Marseille, de nombreux citoyens se sont rassemblés, spontanément, pour partager leur joie après la mort du fondateur du Front National en 1972. Des réactions qui n’ont pas été pas appelées par des partis politiques ou même des syndicats. Pourtant, ces derniers ont fait jazzer dans l’Hexagone.
De multiples visions
« Je ne célébrerai pas la mort de Jean-Marie Le Pen mais je comprends qu’on puisse la célébrer. Les gens qui sont choqués par cela devrait avoir une introspection sur pourquoi cela les dérange. Pour moi, ce point de vue sous-entend que malgré plusieurs idées problématiques, ils ont du respect pour quelqu’un alors qu’il n’a que transmis de la haine toute sa vie. Ce n’est pas parce qu’il est mort que cela change quelque chose à la personne et qu’il mérite la dignité« , explique Armand Guillou, étudiant en journalisme et alternant à RCF Moulins.
« Jean-Marie Le Pen c’est des Algériens torturés pendant la guerre. Jean-Marie Le Pen c’est dire que les chambres à gaz sont un détails de l’histoire. Jean-Marie Le Pen c’est le mot « sidaïque ». Jean-Marie Le Pen c’est l’homophobie assumée. Jean-Marie Le Pen c’est affirmer que la légalisation de l’avortement est une régression pour toutes ces personnes. Il a tout au long de sa vie insulté et pour toute la haine qu’il a attisé et entretenu, donc je pense que oui on peut célébrer sa mort. Ce n’était pas un homme comme les autres. Pourquoi est-ce que l’on devrait respecter un homme qui a hiérarchisé les hommes et ne les a jamais respecté tout au long de sa vie ? Malheureusement, il ne faut pas oublier que certes l’homme est mort mais que ses idées véhiculent toujours et qu’il faut les combattre« , explique une jeune femme de 20 ans souhaitant rester anonyme.
Un monde politique plus divisé
Pour ce qui est de nos hommes politiques, les prises de position sont diverses et loin d’être uniformes. À droite et à l’extrême droite, on salue la mort d’un « grand homme« , « visionnaire ».
« Jean-Marie Le Pen était le dernier grand acteur politique au sens tribun, au sens joute verbale. Il est inséparable de l’histoire de la Ve République, comme Jacques Chirac, comme François Mitterrand, comme Georges Marchais et comme d’autres« , estime Stéphane Schreck, député Rassemblement National de la 8ᵉ circonscription du Var.
Entre autre, côté gouvernement, les déclarations sont assez ambiguës. François Bayrou, notre Premier ministre a déclaré sur X :
« Au-delà des polémiques qui étaient son arme préférée et des affrontements nécessaires sur le fond, JM Le Pen aura été une figure de la vie politique française. On savait, en le combattant, quel combattant il était. »
Une sortie médiatique peu habile qui est assez mal passée. En effet, le grand combattant honoré était aussi un fervent défenseur de la torture ce que n’ont pas oublier de lui rappeler de nombreux internautes et certains opposants politiques. Même son de cloche pour Bruno Retailleau. Pour le reste du gouvernement, la modération est de la partie. On ne fête pas la mort mais on ne le panthéonise pas non plus. Cap vers le centre !
Une gauche hésitante
Pour les Insoumis et sa cheffe de file Mathilde Panot, on comprend les Français qui sont allés manifester leur joie sans pour autant appeler au rassemblement.
« Ceux qui sont choqués par ce qui s’est passé hier, une jeunesse qui continue « d’emmerder le Front national », sont dans un esprit Charlie le matin et puis le soir sont choqués que des gens puissent faire une blague ou un rassemblement symbolique sur la mort d’un dirigeant d’extrême droite qui était un ennemi de la République », explique-t-elle. Le Parti socialiste a , comme souvent, un avis dissonant de son camarade Insoumis. « Je trouve nul de se réjouir de la mort d’un homme‘, avoue le porte-parole du Parti socialiste Jérôme Guedj.
Champagne or not champagne ?
Beaucoup l’ont mis en avant, Jean-Marie Le Pen n’était pas « un enfant de coeur« . Alors fêter la mort de ses idées homophobes, racistes, antisémites et même certaines fois négationnistes, ne semble pas aberrant. En revanche, fêter la mort d’un homme est beaucoup plus discutable et peut-être qualifié d’immoral. C’est à chacun de se faire sa propre opinion sur la question. Le Menhir est mort, ses idées, elles, sont encore là…