Le 11 octobre 2017, l’aventure olympique française débutait officiellement. En effet, à Lima, les membres du Comité International Olympique (CIO) votaient officiellement en faveur de l’attribution des Jeux Olympiques 2024 à Paris. Une véritable fierté, 100 ans après les derniers Jeux organisés sur le sol Français. Très rapidement, l’emballement médiatique débutait et le spot de Teahupo’o était choisi pour accueillir les épreuves de surf. Pour sa deuxième apparition olympique, ce sport de glisse aura donc pour cadre une vague mythique, considérée par certains surfeurs comme la plus belle du monde. À ce propos, Tony Estanguet, président du Comité d’organisation des Jeux de Paris 2024 (Cojo), expliquait ce choix : « Le site de Tahiti proposait les meilleures conditions pour les athlètes. C’est le meilleur spot français à cette période de l’année, c’est aussi un clin d’œil aux origines du surf en France. »
Des épreuves de surf mettant en danger les écosystèmes marins ?
Toutefois, cette décision, saluée par tous, fut très rapidement mise à mal par l’irruption d’une forte polémique. En effet, au moins d’octobre 2023, des associations environnementales tirèrent la sonnette d’alarme pour dénoncer la construction d’une tour en aluminium devant servir à accueillir les juges des compétitions de surf, cela alors qu’une plateforme en bois existait déjà et était utilisée par la World Surf League (WSL). Selon ces dernières, cette nouvelle infrastructure, répondant au cahier des charges du CIO, engendrerait un risque majeur de destructions de coraux.
Suspendus un temps, les travaux reprirent finalement le 1er décembre dernier par des essais techniques, mais ceux-ci se déroulèrent très mal. Effectivement, une barge liée au chantier brisa des blocs de corail, alors que le Cojo affirmait que le projet, « pensé d’une manière respectueuse », permettrait de « préserver l’environnement exceptionnel de l’île ». En réaction, le président polynésien, Moetai Brotherson, se déplaça deux jours plus tard sur le site pour constater les dégâts, et déclarer l’arrêt momentané des travaux en demandant « pardon à Teahupo’o pour ce qui s’est passé ». Une prise de parole saluée dans la foulée par la Fédération Internationale de Surf (ISA).
Puis, parallèlement à l’ouverture d’une enquête confiée à l’office centrale de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé, la ministre des sports, Amélie Oudéa-Castéra, déplorait les conséquences de l’accident : « Il y a eu un test qui n’a manifestement pas été bien préparé et n’a pas pu être bien conduit et a malheureusement abîmé des bouts de corail, c’est évidemment tout à fait regrettable ». Avant de réaffirmer le fait qu’il n’y aurait « pas de plan B » et donc pas de changement de site pour les épreuves de surf.
Une solution pour une sortie de crise ?
Dans la perspective de trouver une solution rapide pour sortir de cette crise naissante, le président de la Polynésie, la ministre des sports, une représentante du Haut-commissariat, le maire de Teahupo’o, trois bureaux d’études et des associations se rencontrèrent alors le 10 décembre 2023. Au sortir de cette réunion, Moetai Brotherson se réjouissait : « La solution [celle d’une tour allégée de 9,75 tonnes et de 150 m2, qui devrait réduire mais pas éliminer les impacts sur l’environnement] qu’on a réussi à faire adopter ce soir permet que les JO se tiennent ici et que la WSL maintienne une étape annuelle du tour mondial. » En effet, quelques jours plus tôt, Pascal Luciani, référent local de la WSL, annonçait que la plateforme en bois déjà existante était devenue non-conforme et pourrait entraîner l’annulation de la compétition du CT.
Cependant, cette « sortie de crise » ne sembla pas convenir à tous. C’est notamment le cas de Mati Hoffmann qui dénonçait : « […] cette nouvelle construction s’apprête à détruire une bonne partie du récif. Les risques sont simples et considérables : La destruction du récif a un impact négatif sur l’écosystème marin qui pourrait perturber l’ensemble de la vie marine et venir propager ce que l’on appelle la ciguatera. » Cette maladie, contaminant et rendant impropre la consommation de poissons, pourrait donc causer une véritable crise sanitaire.
Des enjeux environnementaux relégués au second plan
Pourtant, aujourd’hui à 130 jours de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024, la polémique s’est essoufflée et le Cojo semble avoir remporté sa bataille contre les détracteurs de son projet. Il est vrai, qu’après-avoir refusé l’utilisation de drones pour filmer la compétition de surf, le Comité d’organisation des Jeux de Paris a remis en marche les travaux de construction. Selon le calendrier annoncé, la structure en aluminium et le réseau sous-marin de la plateforme devraient être terminés pour pouvoir accueillir l’épreuve annuelle de la WSL, le 13 mai. Cette compétition fera ainsi figure de test avant les JO qui débuteront en juillet. De ce fait, quel qu’en soit le prix à payer pour les écosystèmes marins de l’île, les juges des épreuves de surf des Jeux Olympiques se trouveront bien dans une nouvelle tour.