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“CS en route vers les JO” – L’illusion d’une Trêve olympique

Comme l’impose la tradition, la Trêve olympique aura lieu durant les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, sur une période allant du 19 juillet au 15 septembre. Issue d’une tradition grecque et reprise à son compte par l’époque contemporaine depuis 30 ans, la Trêve olympique devrait vraisemblablement n’être qu’une chimère, devant l’inexorable propagation des tensions, de la violence et des guerres dans le monde.

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La Trêve olympique a été fixée entre le 19 juillet et le 15 septembre. © Pixabay

La Trêve olympique, de la Grèce antique à l’époque contemporaine

Le 21 novembre 2023, l’Assemblée générale des Nations unies a proclamé la Trêve olympique, couvrant une période du 19 juillet 2024 au 15 septembre 2024, englobant l’intégralité des Jeux olympiques et paralympiques. Tradition remise au goût du jour depuis trois décennies, la Trêve olympique est désormais devenue un rituel, proclamée chaque fois que le monde du sport, que ce soit en été ou en hiver, se réunit pour le plus grand évènement sportif du monde.

À l’origine, cette tradition, nommée « Ekecheiria » en grec ancien, n’avait pas la dimension philosophique et politique que l’on peut lui prêter aujourd’hui. La raison de cette trêve était double. En premier lieu, elle permettait aux athlètes, spectateurs et artistes, qui se rendaient sur le site sportif à Olympie, de voyager sans risque, dans une Grèce qui souvent était en état de guerre permanente. En second lieu, il convient de noter que les sportifs participant aux Jeux les plus prestigieux de la Grèce antique, étaient souvent de ceux parmi les meilleurs éléments militaires que possédaient les armées des cités grecques, qui se retrouvaient, de fait, affaiblies durant la période festive.

La tradition fut réinventée dans les années 90, devant les atrocités commises en ex-Yougoslavie et la nécessité de permettre aux sportifs issus de ces pays de participer à l’aventure olympique. Ainsi, en octobre 1993, l’Assemblée générale des Nations unies adoptait sa première résolution appelant les États à respecter la Trêve olympique. Cette initiative prend toute sa place dans la philosophie pacifiste, présente dès l’origine, à la naissance des Jeux olympiques modernes, à la fin du XIXème siècle. Celle-ci affirme le pouvoir du sport pour inspirer et propager la paix, l’amitié entre les peuples, la compétition pacifique et harmonieuse. Nelson Mandela illustre cette approche intellectuelle comme suit :

« Le sport a le pouvoir de changer le monde. Il a le pouvoir d’inspirer. Il a le pouvoir d’unir les gens d’une manière que peu d’autres choses peuvent. Il parle aux jeunes dans une langue qu’ils comprennent. Le sport peut créer l’espoir là où il n’y avait que du désespoir. » 

Les Jeux olympiques comme plateforme pour la sensibilisation environnementale : les campagnes et les partenariats de Paris 2024 ©CSactu

Une tentative de Trêve dans un contexte difficile

Le contexte qui entoure la Trêve olympique ne lui est pas favorable. Partout autour du monde, les conflits apparaissent, s’étendent, s’exacerbent. Que ce soit en Europe, avec le conflit entre la Russie et l’Ukraine, en Asie, avec les conflits au Moyen-Orient ou encore en Afrique, avec la guerre civile au Soudan, le monde connaît une recrudescence des conflits à la violence aveugle, contraires aux aspirations de la communauté internationale. Si les JO se réclament des valeurs fraternelles unissant les peuples que le sport doit transmettre, ils n’échappent cependant pas aux troubles auxquels le monde fait face. Ainsi, l’apolitisme dont le CIO se revendique est mis à mal, en particulier dans son traitement du cas de la Russie, qui s’est vue être exclue de représentation officielle aux Jeux, quand d’autres États pratiquant les mêmes ignominies ne se voient infliger aucune sanction. Tout est politique, s’il en est.

Comme chaque période pré-olympique, l’Assemblée générale des Nations unies a voté une résolution nommée « Pour l’édification d’un monde pacifique et meilleur grâce au sport et à l’idéal olympique », le 21 novembre 2023, présentée pour le compte du gouvernement français par Tony Estanguet, triple champion olympique de canoë et président du Comité olympique de Paris 2024. Contrairement à l‘usage selon lequel la Trêve olympique est décidée par consensus de tous les États-membres de l’ONU, sans vote, l’adoption de la Trêve olympique a cette fois-ci requis un vote, sous l’impulsion de la Russie. Cette Trêve olympique est, de ce fait, la moins bien admise de l’histoire, avec une résolution adoptée à 118 voix pour, 2 abstentions, à savoir la Russie et la Syrie, et 0 voix contre. 

Le président de la République Emmanuel Macron s’est à plusieurs reprises engagé en faveur de la Trêve olympique et a exprimé sa volonté de la voir être respectée. Pour cela, il a obtenu un soutien de choix, en la personne du président de la République populaire de Chine Xi Jinping, qui a manifesté son soutien à l’initiative au cours de sa visite d’État en France, qui a eu lieu début mai.

La Trêve olympique d’ores et déjà condamnée ?

Si les deux chefs d’États vont tenter d’user de leur influence pour permettre l’application de la Trêve olympique, celle-ci semble déjà n’être plus qu’un mirage. Pour être pessimiste, il suffit simplement d’observer le passé. La Trêve olympique n’a pas empêché la violence de se déchaîner. Pour ne prendre l’exemple que de la Russie, ses trois dernières soumissions de territoire, contraires au droit international, se sont déroulées en période de Trêve olympique. En août 2008, alors que se déroulaient les Jeux olympiques d’été à Pékin, la Russie violait le territoire de la Géorgie pour s’emparer de deux régions russophones, l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud. En février 2014, alors que venaient de s’achever les Jeux olympiques d’hiver à Sotchi et que la Trêve olympique était encore en vigueur, la Russie violait le territoire de l’Ukraine et annexait la Crimée. Une fois encore, en février 2022, lors de la dernière Trêve olympique en date, la Russie envahissait l’Ukraine.

Une fois n’est pas coutume, la Trêve olympique ne sera pas respectée. En effet, la Russie comme l’Ukraine ont toutes deux rejeté sa mise en œuvre, en réaction à la proposition d’Emmanuel Macron. De même, il paraît compliqué d’imaginer un arrêt des combats au Moyen-Orient, Israël bombardant sans relâche la bande de Gaza depuis bientôt 8 mois, même si l’accord de cessez-le-feu peut encore être accepté par les deux parties. De la même manière, il semble illusoire d’envisager un cessez-le-feu entre les forces belligérantes au Soudan, pour ne citer que les conflits auparavant évoqués. Les États n’ont manifestement pas la volonté d’abandonner leurs velléités pour les valeurs de l’olympisme.

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