La 76ème édition du Festival de Cannes vient de clôturer ses portes, et avec lui, ce sont les strass et les paillettes du monde du cinéma qui ont quitté la French Riviera. Bulle éphémère souvent décriée, le festival cinématographique international doit aujourd’hui répondre à l’urgence climatique. Au milieu des stars de la Croisette, l’écologie s’est donc invitée sur le tapis rouge, remettant en question l’impact écologique d’une telle manifestation culturelle.
Des mesures en faveur de la transition écologique
En 2021, le Festival de Cannes, sous la présidence de Pierre Lescure, avait pris un virage considérable en mettant en place de nombreuses actions en faveur de l’environnement. En effet, le cabinet de conseil Green Évènement avait été chargé de repenser la stratégie du festival français pour lui donner une vraie “green touch”. Thierry Frémaux, délégué général du festival, clamait alors que l’événement était “le premier festival à afficher des convictions environnementales”.
Cette année encore, il continue sa mue. La présidence du festival a diminué de 75% l’impression de ses brochures au profit de prospectus dématérialisés. Autre action notable, la distribution de bouteilles en plastiques a été totalement supprimée. Pour se rendre compte de l’impact de cette mesure, c’était plus de 22 000 bouteilles d’eau qui avaient été utilisées durant la quinzaine. À la place, ce sont des fontaines à eau qui ont été installées un peu partout sur place.
De plus, le Festival de Cannes cherche à compenser son empreinte carbone en reversant une partie de ses fonds récoltés à des associations ou à des projets, luttant en faveur de la reforestation ou de la protection des fonds marins. À titre d’exemple, cette 76ème édition a ainsi permis le financement du projet 1 OCEAN, à hauteur de 50 000 euros. Il a pour objectif de sensibiliser le grand public à la faune et flore marine présentes en Méditerranée.
Un prix “éco-responsable”
Côté grand écran, l’association Ecoprod a remis le prix du film éco-produit. Cette nouvelle consécration à pour mission de mettre en lumière « les longs-métrages produits de la manière la plus éco-responsable possible ». Le jury, composé notamment de l’actrice, réalisatrice et scénariste Audrey Dana et de l’activiste Camille Etienne, a donc récompensé le film Acide, réalisé par Just Philippot. Productrice du film, l’agence Bonne Pioche Cinéma a réagi: « Notre responsabilité de producteur, au-delà des ambitions artistiques et économiques d’un film, se doit d’être citoyenne. Sans prétendre être irréprochables, nous nous engageons à ce que tous nos tournages intègrent cette volonté de limiter notre empreinte carbone. » Avant de poursuivre: « Au-delà de la réussite artistique d’un film, les équipes sont également fières de participer à cet engagement pour des tournages éco-responsables. »
Des mesures encore loin d’être suffisantes
Toutefois, on peut légitimement se poser la question de savoir si toutes ces mesures sont suffisantes, dans un contexte où les scientifiques et climatologues ne cessent d’alerter sur l’urgence de la situation climatique. Un peu partout dans le monde, les feux de forêts et les épisodes de sécheresse s’intensifient et le monde du cinéma continue de rejeter des milliers de tonnes de CO2 dans l’atmosphère. En effet, on estime que plus de 80% de l’empreinte carbone du Festival de Cannes est imputable aux voyages en jet privé et à l’hébergement des festivaliers. Une véritable aberration écologique qui pourrait être résolue par des mesures fortes.
Des accusations de Greenwashing
Pire encore, depuis quelques jours des accusations de greenwashing fusent de toute part. En effet, le 17 mai dernier, Disclose a publié une enquête dans laquelle il accuse les dirigeants du Festival de Cannes de surestimer leur compensation carbone. En effet, ils ont fait appel au cabinet suisse South Pole, pour compenser leurs émissions de CO2 grâce à la plantation d’arbres. Ainsi, le festival cinématographique n’a cessé de mettre en avant son engagement pour “la préservation de la forêt sur les rives du lac Kariba au Zimbabwe“. Sur le papier et selon South Pole, ce projet avait pour but de permettre une compensation à hauteur de 42 millions de tonnes de CO2. De quoi contrebalancer une partie des 38 000 tonnes de carbone rejetées dans l’atmosphère, lors de la 75ème édition. Cependant, les faits ont revelé que le projet Kariba avait permis une compensation trois fois inférieure aux chiffres avancés par le cabinet suisse.
Lors d’une conférence de presse, le secrétaire général du festival, François Desrousseaux, a défendu l’intégrité du festival cannois dans cette affaire: “Ce que je peux juste vous dire c’est qu’au moment de ce projet, qui est choisi par les membres du comité, il avait reçu le label de l’ONU. Il était approuvé par un certificateur ultra connu dans le secteur, bref, il cochait toutes les cases, toutes les bonnes cases qui justifiaient qu’il soit soutenu dans ce contexte là.”