Le Royaume de Bahreïn et le sport
Ancien protectorat britannique, le Royaume du Bahreïn accède à l’indépendance en 1971. Dirigé par la famille Al Khalifa depuis 1783, le pays va connaître un rapide développement lié à l’exploitation des ressources pétrolières présentent en abondance sur son sol. A partir des années 1990, le pays entame un programme de diversification économique, le sport étant l’un des atouts sur lequel le pays a rapidement misé.
En football, l’équipe nationale du Bahreïn crée en 1966 occupe actuellement la 76e place au classement FIFA. Bien que très populaire dans le pays, l’équipe n’est jamais parvenue à s’imposer au niveau international. Son meilleur résultat en compétition est une 4e place lors de la Coupe d’Asie des nations en 2004, sans jamais parvenir à se qualifier pour une Coupe du Monde. En parallèle, le royaume investit dans le football à l’étranger sur les modèles de ses voisins du Golfe, par le bais de multiples fonds d’investissements.
Depuis 2004, le royaume accueille son propre Grand Prix de Formule 1 sur le circuit international de Sakhir, alors remporté par Michael Schumacher. Cette première édition fait alors du Bahreïn, le premier Etat du Moyen-Orient à accueillir un Grand Prix de Formule 1, suivi des Emirats Arabes Unis en 2009 puis par l’Arabie Saoudite et le Qatar en 2021. 20 ans après son inauguration, le Grand Prix de Bahreïn accueille plus 100 000 spectateurs du monde entier sur le week-end tous les ans, faisant de la course, l’évènement sportif le plus attractif du pays.
En 2017, le pays accède au monde du cyclisme professionnel par la création de l’équipe Bahraïn Victorious, qui obtient dès sa création, une licence UCI World Team (licence pour courir en première division internationale). Créée et sponsorisée par le gouvernement, sous l’impulsion du prince héritier du Bahreïn, Son Altesse Cheikh Nasser bin Hamad Al Khalifa, elle dispose d’un budget d’environ 16 millions d’euros avec des figures du cyclisme mondial dans ses rangs comme Vincenzo Nibali, Dylan Teuns ou encore Matej Mohorič…
A l’échelle Olympique, le Bahreïn se dote en 1978 d’un Comité national olympique, reconnu l’année suivant par le Comité international olympique (CIO). La délégation Bahreïnite participe à sa première olympiade en 1984 à Los Angeles. Il faut attendre les Jeux de Londres en 2012, pour le pays remporte une première médaille d’or, mais aussi la première médaille olympique de son histoire, remportée par Maryam Yusuf Jamal en athlétisme féminin. Quatre ans plus tard, à Rio, les athlètes remportent deux médailles (une en or et une en argent). Les Jeux de Tokyo se soldent par une médaille d’argent en natation féminine. Enfin, les Jeux de Paris ont vu deux médailles d’or, une médaille d’argent et une médaille de bronze. Toutes ces performances portant alors le bilan à un total de 8 médailles olympiques pour le royaume.
Une importante politique nationale de promotion du sport…
Tout comme l’Arabie Saoudite, le Bahreïn développe lui aussi un plan appelé “Vision 2030”. Au-delà des aspects économiques de ce plan, il accorde une place importante à la promotion du sport sur le territoire du royaume et ce, dès le plus jeune âge. Mais le pays dispose de multiples institutions faisant la promotion de la pratique sportive sur son territoire.
Pays précurseur, le Bahreïn dispose depuis 1975 d’un Conseil suprême de la jeunesse et des sports. Il a pour objectif de définir les politiques générales des programmes de jeunesse et de sports, pour faire du royaume une nation active avec des jeunes innovants et de nombreuses réalisations sportives. Il est présidé depuis 2010 par le prince héritier du Bahreïn, Nasser bin Hamad Al Khalifa, qui n’hésite pas à s’afficher dans de nombreuses compétitions nationales et internationales dans diverses disciplines (course à pied, courses de chevaux, cyclisme…).
En 2012, le gouvernement Bahreïnite a publié un plan stratégique relatif au sport. Il vise notamment d’ici 2030, de permettre au royaume d’accueillir de nombreuses compétitions internationales, par la construction d’infrastructures adaptées, mais également le développement de clubs, fédérations sportives aux normes internationales. Le plan insiste notamment sur le fait que le sport pourra aussi contribuer au développement du pays, par l’apport de nouvelles technologies avancées et l’arrivée d’un marché, permettant au pays de rayonner à travers le monde.
Dans la continuité de ce plan, le Comité Paralympique de Bahreïn est créé en 2017. En lien avec le Conseil suprême de la jeunesse et des sports, il a vocation à accompagner et repérer les talents paralympiques du royaume et leur permettre de concourir dans diverses compétitions internationales. Au-delà de l’aspect sportif, ce comité port avant tout un objectif d’inclusivité, pour faire des personnes en situation de handicap, des membres actifs de la société. Si la délégation paralympique Bahreïnite ne compte pour l’instant aucune médaille en deux olympiades, les compétitions et événements sportifs à destination des personnes en situation de handicap se multiplient dans le pays.
La polémique des dopages et naturalisations…
En août dernier, plusieurs fédérations sportives du Bahreïn ont fait l’objet d’une importante enquête pour dopage dans le cadre de compétitions internationales. Entre 2020 et 2021, plusieurs athlètes Bahreïnites avaient déjà été suspendus suite à des vérifications réalisées par l’Agence de contrôles internationale.
Dernièrement, la fédération d’athlétisme du pays a été reconnue coupable de plusieurs cas de dopages. La fédération a notamment reconnu avoir agi de manière négligente, ce qui a “porté préjudice aux intérêts de la fédération internationale”. Face à la polémique et en guise de sanction, la fédération nationale d’athlétisme a accepté de ne plus naturaliser d’athlètes étrangers avant 2027, le pays s’est également engagé à financer la création d’une agence antidopage nationales, affiliée à sa “Talent Academy”.
Mais pourquoi une telle sanction ? Le Bahreïn, pays le moins peuplé des pays du Golfe (environ 1.5 million d’habitants), ne dispose pas de ce fait d’un grand nombre d’athlètes natifs du royaume. Dans sa volonté de s’affirmer dans les compétitions sportives internationales, le pays a engagé depuis les années 2000, une importante politique de naturalisation de sportifs, venant pour la plupart de pays en guerre ou marqués par une forte instabilité politique, sociale ou économique. L’exemple le plus parlant de cette politique n’est autre que la médaillée d’or en 3000 mètres steeple aux Jeux de Paris, Winfried Yavi née au Kenya. Sur les quatre médailles remportées par la délégation olympique Bahreïnite à Paris, aucune n’a été remportée par un athlète natif du royaume.
Le pays a été également épinglé pour des cas de dopages d’animaux et tout particulièrement de chevaux. En février dernier, le Bahreïn remportait le championnat du monde d’endurance équestre aux Emirats Arabes Unis devant la France et le Portugal. Un mois après la fin de la compétition, un échantillon prélevé sur la jument du cavalier Abderrahmane Mohammad Al-Zayed, s’est avéré positif à diverses substances dopantes, dont des stéroïdes anabolisants. Suite à ces révélations, le pays perd officiellement son titre le 5 juin, au profit de la France et a vu son cavalier suspendu pour dix-huit mois avec une amende de 5000 francs suisses.
Une influence croissante par investissements…
Les fonds d’investissements sont devenus des outils incontournables de la politique sportive Bahreïnite à l’échelle internationale. Ils permettent notamment de promouvoir l’image du royaume au travers d’entreprises puissantes et influentes. Dans ce sens, en 2006, l’Etat fonde par décret royal la Bahrain Mumtalakat Holding Company B.S.C. qui investit dans divers domaines. Ce fonds est notamment propriétaire du Groupe McLaren depuis 2024.
Depuis 2020, le royaume du Bahreïn est devenu actionnaire minoritaire et sponsor principal du Paris FC. Pour s’offrir 20% des parts du club de Ligue 2, le pays a déboursé 5 millions d’euros, faisant alors passer le budget du club de 14.5 à 19 millions d’euros. Cet investissement témoigne de la volonté de l’Etat à s’implanter en Europe, en renforçant sa visibilité sur les terrains de football.
Enfin, le groupe Investcorp fondé en 1982 et basé à Manama, capitale du Bahreïn est l’un des fonds d’investissements les plus influents au monde, avec un chiffre d’affaires annuel estimé autour de 42 milliards de dollars. Influent dans une pluralité de domaines (luxe, immobilier…), le groupe avait entamé en 2022 des pourparlers avec les dirigeant de l’AC Milan pour un éventuel rachat du club pour 1.1 milliard d’euros. Finalement, en mais 2022, les dirigeants du club et les responsables du groupe annoncent qu’ils ne sont pas parvenus à s’accorder, marquant la fin des négociations.
Quel avenir ?
La politique sportive entamée par le Royaume de Bahreïn, illustre la volonté des pétromonarchies à renforcer leur visibilité internationale tout en diversifiant leur économie. Depuis 1971, le Bahreïn a largement investi dans le sport, lui permettant d’organiser des évènements d’envergures suivis par des millions de spectateurs comme la Formule 1 ou encore le cyclisme international.
Elément clé de son plan “Vision 2030”, le sport poursuit également un but social pour le royaume par la promotion de l’inclusivité et l’accès à la pratique sportive pour tous les jeunes du pays. Malgré plusieurs controverses, un manque d’athlètes locaux mais aussi une influence croissante à l’étranger au travers de ses multiples fonds d’investissements, le gouvernement local est déterminé à faire de Manama un lieu incontournable du sport à l’échelle mondiale.