Artemile, un jeune artiste anonyme français, a passé les trois dernières années à fusionner le rap et la peinture sous son pseudonyme. Sa démarche artistique consiste à unir ses passions et inspirations afin de créer des œuvres uniques. Récemment, il a organisé sa première exposition dans le 10ème arrondissement de Paris, qui a servi de carte de visite pour présenter son travail accompli au cours des deux dernières années.
Artemile tire son inspiration de divers univers artistiques, puisant aussi bien dans la peinture classique de William Turner et Monet que dans la culture urbaine représentée par des artistes tels que PNL et Booba. Cette diversité d’influences se reflète dans ses tableaux, lui permettant ainsi de toucher un public varié de tous âges. Son objectif est double : offrir une vision nouvelle du rap, souvent stigmatisé comme une sous-culture, et briser les conventions des expositions de peinture classique, souvent perçues comme élitistes. Le mariage de ces deux univers artistiques antagonistes est un parti pris audacieux, mais les réactions des visiteurs témoignent de son succès.
« Artemile a réussi à mélanger deux univers qui ne se rencontrent jamais, et pourtant ces deux catégories si disparates s’allient parfaitement »
Miriam
« Artemile a réussi à mélanger deux univers qui ne se rencontrent jamais, et pourtant ces deux catégories si disparates s’allient parfaitement », confie Miriam, une trentenaire qui a découvert l’exposition par hasard. »Je suis venue avec une amie et ma mère, car j’ai toujours aimé à la fois le monde du rap et de la peinture. Cet artiste m’intriguait énormément, je devais me déplacer », affirme Sanaa, une jeune fille de 17 ans. « Personnellement, ce genre musical ne me parle pas, mais je suis agréablement surprise par la beauté des tableaux », ajoute Nadège, la mère de Sanaa.Artemile cherche à associer la peinture et le rap en donnant une identité visuelle à ses émotions musicales, exprimant ainsi sa vision de la musique et d’autres formes culturelles qui l’entourent.Pour Artemile, la peinture n’est pas seulement un simple médium pictural, mais un matériau avec lequel il peut jouer en exploitant ses textures et sa façon d’interagir avec la lumière. Il expérimente avec différents matériaux et techniques pour explorer les particularités de chacun et offrir des rendus uniques selon le contexte et l’histoire de chaque toile.
Revenons sur quelques-unes des toiles les plus marquantes de cet artiste anonyme, qui nous dévoile son processus de création ainsi que les inspirations qui l’ont guidé dans la réalisation de ces tableaux.
« Ouest Side » de Booba :
Artemile rend hommage à Booba, considéré comme l’un des grands classiques du rap français, à travers deux tableaux : « Ouest Side », représentant le troisième album du rappeur, et « Lunatic », en référence au groupe mythique des années 90 composé d’Ali et de Booba, qui a révélé ce dernier. Sur ces toiles, Artemile n’hésite pas à ajouter sa touche personnelle en revisitant les œuvres. Pour « Ouest Side », il utilise la technique du glacis, qui superpose une couche transparente de peinture à une autre déjà sèche, créant ainsi un effet de transparence similaire à celui des vitraux des églises, une technique utilisée par Léonard de Vinci. Cette peinture fait également référence à la photographie emblématique de Malcolm X, une figure qui continue d’inspirer les rappeurs. Dans le tableau « Lunatic », Artemile met en valeur les visages des deux rappeurs en accordant une importance particulière aux reliefs, donnant l’impression que les visages surgissent littéralement de la toile. En utilisant exclusivement le noir et le blanc sans aucun mélange, il accentue le contraste et la puissance de l’image.
« Crash » de Prince Waly :
Cette œuvre représente la pochette d’album de Prince Waly et symbolise son « crash », une métaphore liée à l’annonce de sa maladie, le cancer. Pour renforcer le mouvement et la violence de cette collision, la toile est volontairement détériorée jusqu’à ce que la structure en bois apparaisse. La voiture est représentée de manière peu détaillée, dessinée au fusain afin de mettre en valeur le personnage, plus réaliste. La couleur rouge traduit la détermination et l’énergie avec lesquelles le rappeur a lutté contre sa maladie qui affectait ses cordes vocales, une ironie pour un chanteur.
« Black Roses and Lost Feelings » de Josman :
Ce triptyque de peintures métaphorise le parcours ardu de Josman pour atteindre le sommet. En effet, Josman a mis plusieurs années avant de sortir de l’ombre. Le tableau représente un personnage anonyme confronté aux forces de la nature, telles qu’illustrées sur la pochette d’album originale. Progressivement, ce personnage se rapproche du spectateur, symbolisant ceux qui contemplent le tableau tout comme Josman a conquis la scène du rap français. Pour rendre l’ambiance sombre et austère dans laquelle cette silhouette fantomatique est prise dans une tempête de neige, le peintre utilise de larges coups de couteau et crée des effets de relief en entourant la toile d’un plastique.
« Stamina » de Dinos
« Stamina » est un diptyque représentant l’endurance, le dévouement et la capacité à relever des défis. Ces deux peintures se succèdent et offrent une symbolique profonde. La première étoile représente un jeune boxeur ignorant qui écoute son entraîneur, qui n’est autre que Dinos. Sur la deuxième toile, on voit le jeune boxeur devenu adulte, une métaphore de l’évolution de la carrière artistique de Dinos. La première toile met en avant la pochette d’album de Dinos, tandis que la deuxième met en lumière deux talents prometteurs français : le boxeur Ibé le Vrai et le photographe 73shot. Ce choix ne se fait pas par hasard, car la boxe et le rap sont deux univers intimement liés.
« Flouka Zamdane »
Le terme « flouka » désigne en arabe l’embarcation de fortune sur laquelle les migrants traversent la Méditerranée au péril de leur vie. C’est une réalité tragique à laquelle Artemile a souhaité rendre hommage à travers cette peinture. Le tableau représente une flouka voguant sur une mer agitée, symbolisant les dangers et les épreuves auxquels sont confrontés les migrants. Artemile utilise des couleurs froides et sombres pour accentuer l’atmosphère dramatique de la scène. En juxtaposant des touches de couleurs vives représentant des visages anonymes, il met en évidence l’humanité derrière chaque histoire de migration.
“On m’a dit qu’la France était belle mais combien de noyades ont été causées par cette flouka.”
Zamdane
« Que le doigt » SCH
Abordons maintenant une œuvre incontournable intitulée « Que le doigt » de SCH, qui rend hommage aux débuts de sa carrière, plus précisément à sa mixtape A7 qui l’a propulsé vers les sommets. SCH est aujourd’hui l’une des figures les plus influentes du rap marseillais et français, étant considéré comme l’un des précurseurs de l’utilisation de l’autotune dans le rap. Inspirée de la scène du film « Blow » avec Johnny Depp, cette toile cherche à retranscrire la puissance de ce personnage, sa force brute et l’atmosphère sombre des freestyles tels que « John Lennon » et « Que le doigt », en utilisant une texture de peinture grossière. L’artiste parvient ainsi à capturer l’énergie et l’intensité qui caractérisent l’artiste SCH, tout en créant une ambiance visuelle en accord avec son style musical distinctif.
Artemile rend un vibrant hommage aux plus grands talents du rap français, tels que Booba, Sch, Prince Waly, Josman, Dinos et Zamdane. Que ce soit à travers la résilience face à la maladie ou la détermination à atteindre les sommets, ces artistes partagent des parcours difficiles marqués par une volonté inébranlable. L’artiste aborde également des sujets d’actualité, comme l’histoire de la migration de Zamdane du Maroc à la France, offrant ainsi une réflexion sur les enjeux sociaux contemporains.
En outre, Artemile rend hommage à d’autres artistes, qu’ils soient des peintres de renommée mondiale tels que Léonard de Vinci ou des figures moins connues comme Pollock avec sa technique du dripping. Il s’inspire également des impressionnistes, comme en témoignent les toiles consacrées à Zamdane et Alpha Wann. De plus, il met en lumière des photographes tels que 73 Shot ou Raegular, des sportifs comme Ibé le vrai, ainsi que des références cinématographiques telles que Malcom X ou le film « Blow ».
À travers ses œuvres, Artemile démontre une grande humilité en accordant autant d’importance aux autres artistes qu’à lui-même. Il célèbre la richesse et la diversité de l’art sous toutes ses formes, offrant ainsi une vision holistique de la créativité et de l’expression artistique.
D’autres toiles d’Artemile: