Dans Le silence de Bétharram, l’intéressée prend la parole. Et ce choix n’est pas anodin : elle est la première membre de la famille Bayrou à s’exprimer publiquement sur les violences sexuelles et psychologiques perpétrées pendant des années au sein de l’établissement religieux Notre-Dame de Bétharram, dans les Pyrénées-Atlantiques. Lieu où plusieurs des enfants Bayrou ont été scolarisés, et où l’épouse du Premier ministre a elle-même enseigné le catéchisme.
Une parole inédite et politique
Ce témoignage bouleverse l’équilibre d’une défense officielle jusqu’alors strictement maintenue. François Bayrou, chef du gouvernement, a affirmé à plusieurs reprises ne jamais avoir été informé des agissements dans l’établissement, réfutant tout soupçon de dissimulation. Son entourage martèle qu’aucune alerte ne lui aurait été remontée. Pourtant, la voix de sa propre fille pourrait venir troubler cette version.
Si le contenu précis de son témoignage n’a pas encore été dévoilé, la seule annonce de sa participation change déjà la donne. Ce n’est plus seulement une affaire d’archives, de signalements ou de responsabilité administrative. C’est désormais une affaire de mémoire familiale, de conscience individuelle, et donc, de crédibilité politique.
Lignes de faille
Ce nouveau rebondissement intervient à un moment clé. Le 14 mai, François Bayrou doit être auditionné par la commission d’enquête parlementaire sur les violences à l’école, commission née directement du scandale de Bétharram. La parution du livre quelques jours plus tôt pourrait devenir une pièce centrale dans l’argumentaire de ceux qui appellent à sa mise en retrait, voire à sa démission.
D’ores et déjà, les oppositions se saisissent de ce basculement. Une partie de la gauche appelle à « faire toute la lumière » sur ce que savait ou ignorait le Premier ministre. À droite comme au centre, le malaise se fait sentir. Les soutiens de Bayrou dénoncent, eux, une « instrumentalisation » familiale et médiatique à des fins de déstabilisation politique.
Silence, déni et justice
Mais ce livre n’est pas qu’une bombe politique. Il s’inscrit dans un combat plus large : celui des victimes. En donnant la parole à des témoins qui, comme Hélène Bayrou, ont grandi dans un environnement touché par ces violences, il questionne les mécanismes du silence et du déni. Il interroge aussi la responsabilité collective de toute une génération d’adultes face à des faits connus, mais tus.
Le sous-texte est limpide : le silence, même involontaire, est complice. Et lorsqu’il s’agit d’un Premier ministre, ce silence devient aussi un sujet politique.
L’avenir suspendu à une parole
En décidant de s’exprimer, Hélène Bayrou ne règle pas des comptes familiaux : elle participe à un mouvement de vérité. Pour François Bayrou, cette parole est un test d’intégrité. Pour l’opinion, c’est une clef d’interprétation. Pour les victimes, c’est peut-être enfin une lueur de reconnaissance.
Dans les semaines à venir, ce livre pourrait bien accélérer une recomposition politique que le gouvernement, déjà fragilisé par les tensions sociales et internationales, ne pourra pas éluder.