Le phénomène des combattants-influenceurs

À l’heure du numérique, les combattants de MMA ou encore les boxeurs sont partout sur nos écrans. À ces gladiateurs des temps modernes qui s’affichent sur les réseaux sociaux, il faut aussi ajouter les influenceurs, qui n’hésitent plus à enfiler les gants pour divertir leur public.

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Lors du combat entre Cédric Doumbé et Baysangur (Baki) Chamsoudinov, à Paris le 7 mars 2024 - FRANCK FIFE

Les sports de combat et le monde de l’influence forment de plus en plus un écosystème interdépendant. Le MMA, par exemple, bénéficie grandement de la visibilité offerte par les influenceurs. Ces derniers attirent un nouveau public et dynamisent l’image du sport. En retour, les créateurs de contenu trouvent dans le MMA un terrain propice au storytelling, aux défis et aux événements viraux.

Une ferveur confirmée par les statistiques. Le résumé du dernier combat du youtubeur Paul Dena, qui l’opposait à Allan Landouzi lors de l’Hexagone MMA 23, a cumulé près de 450 000 vues. Les vidéos des autres combats postés par RMC Sport sur YouTube le même soir ont, elles, peiné à dépasser les 100 000 vues. Une différence liée à la notoriété sur les réseaux sociaux et à la grande promotion qui a été faite. Paul Dena a par exemple posté un documentaire sur sa préparation la veille du combat. « Dernier Round » retrace avec sincérité sa préparation aussi bien physique que mentale pour son dernier combat amateur. La vidéo de 33 minutes totalise près de 150 000 vues et a indéniablement participé à faire grandir les attentes autour de ce combat. De même, le jeune homme a publié, dès le lendemain de sa victoire, une autre vidéo alimentant ce buzz. Il y montre notamment les images de son combat et y soumet son ressenti directement après.

Le MMA passionne indéniablement. Cet engouement peut être expliqué par l’aspect nouveau et mystérieux que le sport maintient auprès du plus grand nombre. N’ayant été légalisé en France qu’en 2020, il bénéficie d’une image moderne, en partie véhiculée par ces combattants-influenceurs.

Les réseaux sociaux, terrain de jeu du trash talk

Les réseaux sociaux sont aussi le lieu d’une discipline à part entière : le trash talk. En France, le maître en la matière reste Cédric Doumbé. Le septuple champion du monde de kick boxing est l’une des figures du MMA français alors qu’il n’a commencé sa carrière dans la discipline qu’en 2021. Celui que l’on surnomme « The Best » sait néanmoins faire parler de lui en provoquant ses adversaires, avant, pendant et après les combats. Lors de son entrée face à Jordan Zebo, qu’il a battu en seulement neuf secondes, Doumbé s’est présenté aux abords de l’octogone muni d’un matelas où l’on pouvait lire « Bonne nuit Jordan ». Ce type d’initiative, qu’elle plaise ou non, rapporte une grande popularité aux combattants mais aussi, plus globalement, à la discipline. Au-delà du trash talk, certains combattants comme Doumbé ont une présence en ligne non négligeable. Le franco camerounais est par exemple apparu dans une vidéo des youtubeurs McFly et Carlito, une autre de Loris Giuliano ou encore dans le podcast The Bridge du footballeur Aurélien Tchouaméni. « The Best » a même publié ses propres vidéos YouTube pour promouvoir son combat l’opposant à Baïssangour Chamsoudinov (Baki), un autre combattant très proche du monde de l’influence. De plus il a récemment fait son retour sur la plateforme, où il ne compte pas moins de 404 000 abonnés, en lançant une émission nommée ANGLE MORT.

Le trash talk ne date pas d’hier dans le MMA. Dès les débuts médiatiques de la discipline, certains combattants ont utilisé la provocation verbale pour intimider leurs adversaires et attirer l’attention du public. L’Irlandais Conor McGregor en est le plus fameux représentant. Véritable maître de la discipline, il a su transformer ses conférences de presse en spectacles qui ont contribué à faire exploser sa popularité ainsi que celle de l’UFC. Ses affrontements verbaux légendaires avec José Aldo, Khabib Nurmagomedov ou encore Nate Diaz ont marqué l’histoire du MMA. Depuis, avec l’avènement des réseaux sociaux, le trash talk s’est démocratisé et même des combattants à la plus faible médiatisation s’y donnent à cœur joie.

Boxe et influence : une relation ambivalente

Si le MMA entretient un lien très fort avec les influenceurs, ce n’est tout de même pas le seul sport de combat à bénéficier de cette mise en lumière. La boxe a aussi droit à ses combattant-influenceurs. Le 7 décembre 2024 a eu lieu l’un des plus grands événements de l’histoire de l’Internet français, le DTR Fight. Organisé par le streameur RebeuDeter, ce gala de boxe opposant des youtubeurs s’étant entraînés pendant huit mois a été un franc succès populaire et statistique. Rassemblant 32 000 spectateurs à Paris La Défense Arena et plus de 1,2 million en direct sur Twitch, le DTR Fight est devenu le plus grand rassemblement de boxe amateur de l’histoire en France. Si de vrais combattants, tels que Benoît Saint Denis ou Brahim Asloum, ont donné leur bénédiction à l’événement en s’y rendant, ce n’est pas le cas pour tous les projets de ce type.

À cette époque où le show prend de plus en plus de place, les performances sportives des combattants populaires semblent en effet passer peu à peu au second plan. Le combat entre Mike Tyson, icône de la boxe âgée de 58 ans, et Jake Paul, youtubeur de 27 ans, symbolise cette apologie du divertissement au prix du niveau sportif. Tous ceux qui se sont laissés tenter par ce combat ont pu se rendre compte, en direct, que la légende de la boxe était trop vieille pour tenir plus de deux rounds à un niveau correct. Derrière cet affrontement se cachait bien plus qu’une simple rencontre sportive : il s’agissait avant tout d’une machine à cash, où l’enjeu sportif a été éclipsé par des motivations financières et médiatiques. L’événement a impliqué des sommes mirobolantes telles que les 40 millions de dollars empochés par Jake Paul ou encore les 108 millions de téléspectateurs sur Netflix. Cela en fait le programme sportif le plus vu en direct sur une plateforme de streaming de l’histoire. Ce succès commercial pourrait pousser les instances de la boxe ainsi que les grands diffuseurs à organiser d’autres rencontres de la sorte alors même que cela semble quelque peu décrédibiliser les sports de combat.

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