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Prostitution de mineurs : un fléau grandissant

Mercredi 25 septembre, acteurs et associations de la société civile ont manifesté pour la protection de l’enfance. Une manifestation faisant suite à une enquête du Parisien révélant que de nombreux mineurs placés sous la protection de l’Aide sociale à l’enfance sont en réalité, la cible de proxénètes. La prositution juvénile, un sujet mal connu du grand public, est aujourd’hui un des fléau majeur de la société française. 

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En France, 15 000 mineurs de l’aide sociale à l’enfance, censés être protégés par l’État, seraient victimes de prostitution.
En France, 15 000 mineurs de l’aide sociale à l’enfance, censés être protégés par l’État, seraient victimes de prostitution. Crédit : Pexels

En France, 15 000 mineurs de l’aide sociale à l’enfance, censés être protégés par l’État, seraient victimes de prostitution. Ces chiffres, révélés par Le Parisien, sont glaçants. Glaçants certes, mais surtout révélateurs de l’ampleur prise par le réseau de prostitution des mineurs en France ces dernières années. Aujourd’hui, ce phénomène progresse de plus en plus rapidement dans les banlieues, les petites villes et les campagnes notamment via les réseaux sociaux.

Le principe est simple : les proxénètes approchent des jeunes vulnérables, souvent des jeunes filles, puis les exploitent sur des sites d’escorting. Il suffit de quelques clics pour tomber sur des images explicites de lycéennes dénudées ou de collégiennes en sous-vêtement. “Cela ne prend que quelques minutes pour poster une annonce sur un site internet. Il suffit de quelques minutes pour que des clients y répondent et qu’un rendez-vous soit fixé” explique une juriste de l’Association Contre la Prostitution des Enfants (ACPE). 

Des chiffres alarmants 

Aujourd’hui, la prostitution des mineurs est telle que n’importe quel enfant peut être touché. Peu importe son niveau social, tant que ce dernier a accès à Internet, il devient la proie des proxénètes. Chiffres à l’appui, entre 2016 et 2020, la proportion des mineurs prostitués a augmenté de 70 %. Et aujourd’hui, 30 % des 40 000 personnes prostituées en France est mineure. La moyenne d’âge s’élevant à quinze ans seulement.

Cette réalité alarmante existait déjà auparavant. “C’est un sujet dont on ne s’est préoccupé que récemment. C’est le plan Taquet de 2021 notamment (premier plan national et interministériel de lutte contre la prostitution des mineurs) qui a contribué à mettre la lumière sur ce phénomène inquiétant” témoigne la juriste de l’ACPE. 

Des victimes “faciles”

La proie idéale : une jeune fille fragile, désespérément en quête d’amour. Une adolescente entre 12 et 17 ans. Majoritairement des jeunes filles attirées par l’argent facile. Même si c’est moins fréquent, certains garçons sont également touchés par ce phénomène. Ainsi, 94 % des mineurs évoqués lors des signalements sont des filles. 5 % des cas sont des garçons et 1 % des personnes transgenres d’après un rapport du Dispositif de lutte contre la prostitution des mineurs (DLPM).

Souvent, il s’agit de jeunes au parcours marqué par des traumatismes, des ruptures, des carences affectives et éducatives… “La minorité est un facteur de vulnérabilité. On constate par ailleurs un cumul des facteurs vulnérabilités chez les mineurs victimes d’exploitation sexuelle raconte la juriste. 

Leur personnalité est difficile à cerner, mais certains signes ne trompent pas. Dans la majorité des cas, ce sont des enfants isolés de leurs parents voir abandonnés. Ils sont en constante recherche d’affection. Ils ont besoin de se sentir utile, d’avoir un point d’ancrage, une attache. Alors, ils se tournent vers les mauvaises personnes, souvent perçus comme la solution “facile”. 

Les réseaux sociaux : porte ouverte pour les prédateurs sexuels. 

L’essor des réseaux sociaux a joué un rôle majeur dans le développement de la prostitution des mineurs. D’abord, il s’agit du support privilégié des prédateurs pour repérer leur proie, puis pour mettre en place leur trafic. Des photos et vidéos, des visages d’enfants et des corps dénudés. Les réseaux sont devenus un véritable terrain de chasse pour les proxénètes. On parle d’ubérisation : tout se passe en ligne.

Plus récemment, les réseaux sociaux sont devenus porteurs d’un problème bien plus grave encore. Ils contribuent à dédramatiser la prostitution. À travers des vidéos postées en ligne, certaines escortes se vantent en étalant leurs billets. Elles ne travaillent plus au bois de Boulogne ou dans des hôtels miteux, mais dans des Airbnb ou des gîtes. Ces vidéos inquiètent et soulèvent un véritable problème : les jeunes filles minimisent ce qui leur arrive. Leur activité paraît presque normale, voire agréable pour ces dernières. “Il y a un véritable phénomène de glamourisation des pratiques prostitutionnelles. La télé-réalité et les réseaux sociaux y contribuent fortement. On observe par exemple des “influenceuses” sur les réseaux sociaux qui vont vendre l’eau de leur bain, des photos de pieds, etc. Toutes ces pratiques contribuent à cette glamourisation des pratiques prostitutionnelles. On constate également une glamourisation du vocabulaire. On parle de “michtonnage”, “pigeonnage”, “escorting” alors même qu’il s’agit souvent de réalités similaires et de situations d’exploitation sexuelle ” dénonce la juriste de l’ACPE.

L’appât du gain est plus fort que la dureté de la situation pour ces jeunes. Elles en arrivent à un point ou ces dernières se dissocient de leur propre corps. Ils ne leur appartiennent plus. Ces jeunes filles le réduisent au simple outil leur permettant de travailler : il devient un objet. 

Proxénètes, nouvelle génération 

Si le proxénétisme existe depuis longtemps déjà, c’est un phénomène en hausse ces dernières années comme nous avons pu le constater. Nouveau moyen de communication, profil différent des victimes, la prostitution de mineure est en constante mutation. Cela est aussi dû à l’apparition d’une nouvelle génération de proxénètes. Ce n’est plus des dealers à la tête d’organisations secrètes qui vont chercher des jeunes filles à l’étranger pour en faire leur “commerce” en France. Il s’agit maintenant de jeunes hommes de 18 à 24 ans qui ont décidé de lâcher la drogue pour les prostituées. Le proxénétisme étant un milieu plus facile d’accès, moins dangereux et plus lucratif pour eux. Pire encore, certains mineurs se lancent même dans ce commerce illégal.  

Alors, comment stopper l’hémorragie ?

L’Etat et des associations souhaitent renforcer les formations de préventions ainsi que les sanctions pour les personnes concernées. Ils en sont convaincus, il faut une meilleure prise en charge de ce fléau. 

L’ACPE, l’association Agir Contre la Prositution des Enfants a partagé plusieurs signaux d’alerte permettant de reconnaître si un enfant se prostitue ou est victime de prostitution. Parmi eux, la fugue, des vêtements coûteux, la possession de plusieurs téléphones, la déscolarisation ou encore des signes de violences physiques. Si les signaux pour repérer les mineurs victimes de prostitutions sont multiples, les signes de souffrances psychologiques concernent 86 % des cas d’après le DLPM. 

Plus concrètement, c’est au niveau des sanctions surtout qu’il faut agir. L’Etat souhaite des peines plus dures pour les clients jugeant celles existantes, trop laxistes, envoyant un message de tolérance. 

Du côté des victimes, il est quasiment impossible de s’en sortir et le plus dur est de se reconstruire. Les dégâts physiques et moraux sont extrêmement intenses. Le plus souvent, ils n’ont pas confiance de la violence des faits qu’ils ont subis. 

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