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Voiture électrique : Les « oubliés » de l’électromobilité

Fin de la production de voitures thermiques en 2035, vignette Crit’Air, zones à faible émissions… La transition est effective depuis quelques années déjà. Mais la voiture électrique est-elle vraiment accessible à tous ?

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Voiture électrique Tesla branchée à un chargeur. © Blomst (Pixabay)
Voiture électrique Tesla branchée à un chargeur. © Blomst (Pixabay)

« En 2023, moins d’un quart des acquéreurs de voitures électriques neuves appartenaient à la moitié la plus modeste des ménages de France », indique un rapport de la Direction Générale de l’Énergie et du Climat (DGEC). Une question se pose alors : les ménages les moins riches sont-ils condamnés à rester sur des modèles thermiques et hybrides ?

La voiture électrique est-elle réservée aux plus riches ?

Les prix des voitures neuves évoluent, « sur toutes les technologies confondues ; thermique, hybride, hybride rechargeable et électrique », déclare Bertrand-Olivier Ducreux, ingénieur au service transports et mobilité de l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ADEME). Ainsi, « le prix des voitures neuves a augmenté depuis cinq ans, d’à peu près 30 % en moyenne. Donc la voiture neuve devient de plus en plus… je ne vais pas dire de luxe, mais moins accessible à tous », continue l’expert. Sophie, une habitante de Vichy (03), partage ce constat : « Je pense qu’il faudrait encore garder des voitures actuelles parce que tout le monde ne pourra pas se payer des voitures électriques ».

Autre problème, le marché de l’occasion. « Certains ménages qui ont des difficultés à acquérir une voiture thermique se rabattent vers le marché de l’occasion pour posséder une voiture pas chère », explique Bertrand-Olivier Ducreux. Or, pour des budgets de l’ordre de 3 000 à 4 000€ par exemple « aujourd’hui il n’y a pas d’offre de voiture électrique d’occasion », continue-t-il. Mais, « c’est un marché très récent donc il va falloir quelques années pour que ces voitures aient huit ans et donc un prix qui a baissé », nuance-t-il. L’accès généralisé aux voitures électriques semble donc n’être qu’une question de temps.

La démocratisation des véhicules électriques

Sur le marché de la voiture électrique, il existe « des offres de moins en moins chères qui sont accessibles ». Bertrand-Olivier Ducreux cite le cas de la Dacia Spring, « une voiture électrique qui est vendue à moins de 20 000€ ». Certes, cela reste plus onéreux que la majorité des voitures thermiques mais moins que lors des débuts du marché puisque ce type de voiture entre sur « le marché par le haut de gamme ». Ce fut le cas de la Tesla qui est « entrée sur le marché à 80 000 ou 90 000€ », rappelle l’expert.

La voiture électrique est souvent décrite comme plus chère que la voiture thermique. C’est vrai si l’on se concentre sur l’achat seulement. « Si on fait une analyse en coût total de possession, c’est-à-dire l’achat, l’assurance, l’entretien, l’utilisation, l’énergie qu’on met dedans… une voiture électrique est moins chère au global qu’une voiture thermique », détaille l’expert de l’ADEME. « Aujourd’hui, on dépense à peu près trois fois moins d’argent pour faire 100kms avec sa voiture électrique que pour faire 100kms avec une voiture thermique », conclut-il. La différence entre les deux type de moteurs se joue au niveau des « prix du pétrole qui sont fluctuants ». Cette variable peut donc rendre l’électrique plus intéressant.

Les aides à l’achat

Les aides permettent de démocratiser la voiture électrique sans délaisser les ménages les plus modestes économiquement. Le 1er janvier 2024, la Direction Générale de l’Énergie et du Climat (DGEC) a lancé le leasing social. Cette aide financière permet « l’acquisition d’un véhicule électrique neuf conditionné à un niveau de ressources », détaille Bertrand-Olivier Ducreux. À l’origine, cette aide est à destination des ménages les plus modestes. Ainsi, « parmi les 25 000 premiers bénéficiaires, figurent 40% de ménages des trois premiers déciles de revenus », explique la DGEC. Pour Bertrand-Olivier Ducreux, la transition écologique peut prendre en compte la dimension sociale. C’est déjà le cas avec le « système du malus CO2 », rappelle l’expert de l’ADEME. « Quand vous achetez une grosse voiture, le malus est pondéré si vous justifiez que vous êtes une famille de trois enfants et donc que vous avez besoin d’une grosse voiture », détaille-t-il.

Une transition vers l’électrique trop rapide ?

« Je trouve que c’est trop rapide. On force les gens et il vaut mieux laisser le temps de s’adapter », déclare Bernard, un habitant de Vichy en référence à 2035. Pour rappel, à cette date l’Union européenne fixe un objectif de « zéro émission de CO2 pour les voitures particulières ».

Une étude de l’ADEME montre aussi que la voiture électrique semble hors de portée pour la plupart des ménages. Ainsi, « 85 % des gens interrogés pensent que les voitures électriques ne sont pas accessibles pour eux », détaille le rapport. Enfin, « 65 % des sondés craignent que la fin des véhicules thermiques creuse les inégalités sociales et territoriales », peut-on lire dans ce même rapport.

Selon Bertrand-Olivier Ducreux, il y a effectivement « des réticences ou des freins au passage à l’électrique ». Au-delà de la question du prix évoquée plus haut, l’expert évoque une probable « mauvaise connaissance de ce qu’est réellement la voiture électrique et de ce qu’elle permet de faire ». Donc certains ménages qui pourraient passer à l’électrique ne le font pas, notamment par incertitude.

Un secteur encore fragile

Autre élément à garder en tête : le marché de l’électrique européen est en grande difficulté aujourd’hui. Certaines marques demandent un délai supplémentaire pour s’aligner sur les normes environnementales. Celles-ci « seront encore plus contraignantes pour les constructeurs en 2025 », rappelle un reportage de France 2. Les véhicules sortis d’usine devront respecter la limite d’émission de 81g de CO2 par kilomètre contre 95g/km actuellement. Mais sans demande suffisante, impossible de faire évoluer le marché. Or, la voiture électrique représente « 13,8 % de parts de marché » alors qu’il faudrait atteindre 20 % pour respecter ces normes, continue France 2.

Le véhicule électrique n’est donc pas encore accepté par la majorité des consommateurs. Le changement de routine est un autre frein à l’achat (chargement, niveau de batterie, places de parking, trajets limités). « Ce n’est pas assez intuitif à mon avis. Ce n’est pas encore très cohérent d’utiliser une voiture électrique actuellement », souligne Hugo.

Les prochaines années seront donc décisives pour le secteur automobile européen. Celui-ci devra se plier aux normes environnementales tout en essayant d’attirer le public vers l’électrique le plus rapidement possible.

Note : Certains prénoms ont été modifiés.

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