La pause numérique : un mobile pour interdire le téléphone portable au collège

Déjà que la rentrée des classes n’est pas une partie de plaisir pour tous les collégiens, cette année certains seront même privés de leur jouet préféré : leur téléphone portable. Nicole Belloubet, ministre démissionnaire de l’Éducation Nationale, l’a annoncé lors de la conférence de presse de rentrée du 27 août. C’est ce qu’elle appelle la “pause numérique”. 

Cette mesure consiste à interdire l’usage du téléphone portable au collège, y compris lors des pauses et récréations. L’expérimentation concerne plus de 50 000 élèves dans 200 collèges s’étant portés volontaires. Et pour le personnel éducatif plus âgé, il leur est conseillé de « faire preuve d’une utilisation raisonnable de leurs appareils de communication pour permettre aux élèves de bien s’approprier la mesure ».

Le collège Marceau Lapierre à Saint-Jean-du-Gard est le collège participant à l’expérimentation de la “pause numérique”. Ce dernier fait partie de l’académie de Montpellier. Hervé Pocino, le principal, approuve cette mesure à 100 % : “ Je la trouve extrêmement intéressante. Elle permettra de couper momentanément le lien charnel entre l’enfant et son téléphone”. Autre avantage : cesser la tentation d’utiliser leur précieux gadget au moment des cours. 

Pourquoi une telle décision ? 

Le lancement de cette expérimentation en France a été décidé à la suite d’un rapport d’experts sur l’impact de l’exposition des jeunes aux écrans, ainsi qu’à l’explosion des cas de violences et de cyberharcèlement. Ce dernier était commandé par le président de le République lui-même. Le rapport mondial de suivi sur l’éducation 2023 de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) explique que l’utilisation du téléphone peut perturber l’apprentissage en classe : il faudrait 20 minutes à un élève pour se concentrer après avoir été distrait par son téléphone. 

Comment ça va fonctionner ? 

Le principe est simple : au moment de rentrer dans l’établissement, l’élève doit éteindre et ranger son téléphone et le récupère à la fin des cours seulement. Hervé Pocino, principal du collège Marceau Lapierre détaille : “ On n’interdit pas le téléphone dans notre collège, mais on parle plutôt de stockage. Autrement dit, l’élève peut venir le matin avec son téléphone. Par contre, il doit le déposer dans une boîte chaque matin. « Nous le stockons toute la journée avant de le lui rendre le soir”. D’ailleurs, les appareils sont maintenus sous clés tout au long de la journée pour éviter les vols. 

Il appartient néanmoins à chaque établissement de déterminer des modalités pratiques pour assurer le respect de la loi. L’utilisation de casier pour ranger ces petits gadgets est la solution la plus utilisée à ce stade. Un système qualifié de “piste intéressante” en vue de la généralisation du dispositif prévue pour janvier 2025. 

Une interdiction déjà présente mais non respectée 

Pour rappel, l’interdiction de l’utilisation du téléphone portable est interdite par une loi datant de 2018. L’article 1 stipule :

Mais en réalité, rien n’empêche les élèves de l’avoir “sur eux” a déploré Nicole Belloubet. Si les téléphones portables sont interdits et doivent être éteints et rangés dans les sacs, certains élèves se débrouillent toujours pour les utiliser en cachette. C’est la raison pour laquelle la “pause numérique” a été pensée. L’interdiction porte également sur tout autre équipement de communication électronique (tablette ou montre connectée, par exemple).

Et en réalité, qu’en pensent les élèves  ? 

“On n’a eu aucun retour négatif sur l’expérimentation de qui que ce soit” explique Hervé Pocino. Au préalable, l’équipe enseignante avait réalisé des concertations avec les parents ainsi que des explications avec les élèves pour présenter le dispositif : “les enfants ont tout de suite compris l’intérêt de la mesure”. Plus encore, certains élèves ne voient plus l’utilité de l’avoir au collège s’ils ne peuvent pas l’utiliser. Ils choisissent alors de ne plus l’apporter du tout.

Pour le principal, la généralisation prévue en 2025 est “évidemment une bonne idée”. Si elle se poursuit, c’est toute la réussite scolaire des élèves, le climat en classe ainsi que la lutte contre le cyberharcèlement qui verra sa situation s’améliorer.