L’origine des migrations climatiques
Bien qu’il n’existe pas de définition précise pour qualifier un réfugié climatique, Oxfam parle d’« une personne qui se retrouve dans une situation dans laquelle sa sécurité ou sa vie sont en danger, se voit forcée de quitter son foyer pour se déplacer vers d’autres régions du pays ou vers d’autres pays, dû aux conséquences des changements climatiques causés par l’action humaine ».
Ces migrations sont induites par trois facteurs environnementaux principaux. Ce sont les cyclones tropicaux, les fortes pluies et les inondations. Les sécheresses et les désertification ainsi que l’élévation du niveau de la mer se situent juste après. Ces phénomènes exercent des pressions diverses sur l’environnement et sur les différents moyens de subsistance. C’est principalement le cas sur l’accès à l’eau potable et aux ressources alimentaires, laissant les populations sans ressources les plus primordiales. De plus, selon un rapport du GIEC du 28 février 2022, ces phénomènes sont considérablement accentués par les émissions de gaz à effet de serre qui provoquent un réchauffement supplémentaire et donc une modification durable de toutes les composantes du système climatique. Les émissions de gaz à effet de serre représentent donc un danger en ce qu’elles augmentent la probabilité d’apparition de ces phénomènes climatiques, et ce, de manière généralisée et irréversibles pour les populations et les écosystèmes.
« Les migrations sont au cœur de l’histoire de l’humanité. Face à l’escalade des catastrophes climatiques, les migrations font partie de la solution. Toute négociation sur le changement climatique doit progresser dans la protection des droits et du bien-être des personnes qui se déplacent à l’ère de l’effondrement du climat. »
The joint Council of the Welfare of Immigrants, Migrants Organise, City of Sanctuary UK
Des conséquences humaines révélatrices d’inégalités sociales
Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a calculé qu’en moyenne, depuis 2008, 21.5 millions de personnes avaient été contraintes au déplacement pour des raisons climatiques. Il est estimé que ce chiffre sera de 260 millions en 2030 et de 1,2 milliards en 2050. En outre, les capacités d’adaptation des écosystèmes et des populations aux changements climatiques diffèrent considérablement d’une région à une autre. C’est également le cas au sein d’une même région. Ce sont notamment les pays les plus pauvres qui sont globalement les plus concernés par ces migrations, principalement en raison de leur localisation mais aussi de leurs revenus faibles, rendant ainsi l’adaptation au changement climatique difficile. Historiquement, ce sont pourtant les pays en développement qui y participent le moins.
D’autre part, on considère qu’il existe deux types de menaces en fonction de leur durée : les menaces soudaines et les menaces d’effet à long terme. Les premières, le plus souvent responsable des migrations, concernent les ouragans, les cyclones ou encore les inondations. Ainsi au Pakistan en août 2022, des pluies torrentielles ont eu pour conséquences de plonger un tiers du territoire sous l’eau et de contraindre plusieurs millions de personnes à migrer. Aux Philippines en 2021, 500 000 déplacements forcés ont été enregistrés après le Typhon Rai.
Les secondes ont des impacts plus graduels bien que leur conséquences soient tout aussi critiques. On parle notamment de sècheresses, de la désertification, de la montée du niveau de mer…Au Niger et dans la région du Sahel central, les périodes de sécheresse sont de plus en plus importantes et dégradent les sols. Ceci a pour conséquences de réduire considérablement la nourriture destinée au bétail. Les périodes de soudures s’allongent également, augmentant la durée des périodes où les récoltes sont impossibles conduisant ainsi à de graves crises alimentaires. Les inquiétudes quant au futur des plus jeunes sont donc de plus en plus importantes et les tensions entre communautés sont fréquentent.
Un défi humain important
Un groupe de travail sur les déplacements a été créé en 2015 lors de la COP21 : Task Force for Displacement. Le but de ce groupe de travail est de prévenir, de réduire et de faire face aux déplacements induits par les changements climatiques en favorisant la collaboration des acteurs concernés par ces mobilités humaines au niveau régional, national et international. Ces acteurs agissent notamment en recueillant différentes données et connaissances sur les migrations, en répertoriant les mesures efficaces et en faisant de la prévention à l’égard des dirigeants et du grand public.
En 2016, l’Université de Liège a également lancé l’Observatoire Hugo qui se consacre aux questions de migrations induites par ces problématiques environnementales. On y étudie ainsi les mouvements de population (forcés ou volontaire) causés par la dégradation de l’environnement, qu’elles soient soudaines ou plus graduelles. De plus, dans le cadre du programme « Horizon 2020 », la Commission européenne a chargé l’observatoire de coordonner le travail de vingt instituts de recherches provenant de 17dix-sept pays sur trois continents. L’un des points d’études principaux de ce programme est de comprendre ce qui pousse certaines populations à quitter leur foyer tandis que d’autres ne le font pas dans un contexte environnemental subissant des pressions tout aussi importantes.
Un enjeu juridique de taille
Par ailleurs, en ce qui concerne la protection juridique de ces populations forcées à migrer, il n’en existe aucune. Le statut de migrant climatique ne fait l’objet d’aucune définition officielle. Depuis la Convention de Genève en 1951, le statut de réfugié est, quant à lui, reconnu et défini. Ainsi, est réfugié celui qui voit sa vie menacée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques. Les migrations liées au changement climatique ne sont, quant à elles, pas prises en compte.
Cet absence de cadre juridique a donc un impact très important puisqu’aucune organisation internationale n’est chargée de surveiller la protection des droits de ces réfugiés climatiques, comme le fait le HCR pour les réfugiés. De plus, le suivi des déplacements à l’échelle internationale reste approximatif. Face à l’absence d’actions juridiques, le 14 février dernier lors du conseil de sécurité de l’ONU pour une discussion sur l’élévation du niveau de la mer, Antonio Guterres, le Secrétaire General des Nations Unies a déclaré, attendre des « réponses juridiques innovantes » en matière de protection des réfugiés après avoir déclaré que « les droits humains des personnes ne disparaissent pas parce que leurs maisons disparaissent ».
Pour plus d’informations : https://www.youtube.com/watch?v=0pJEbapBsJI&ab_channel=FRANCE24