Éric Ciotti s’est rendu dans ce pays nordique, il raconte : « échanges très enrichissants avec le ministre danois de l’immigration et de l’intégration. Le Danemark a écouté son peuple et a grandement freiné l’immigration ». Le porte parole du gouvernement Olivier Véran, ancien député socialiste, s’est lui aussi rendu au Danemark pour comprendre ou s’inspirer. Comment et pourquoi la classe politique française s’intéresse autant à la politique migratoire danoise ?
Des mesures contraignantes
C’est l’un des pays les plus fermés d’Europe. Depuis 2015 le nombre des demandeurs d’asile a été divisé par 10. Tout a été fait pour décourager les étrangers de venir :
Accès restreint aux allocations, préférence nationale sur les logements sociaux, tests de langue renforcés, expulsion en cas de manquement à la loi … Il s’agit donc d’une vraie politique de fermeté orchestrée par la gauche au nom de la défense de l’État providence. Le gouvernement danois mets en place des méthodes rugueuses, et des dispositifs discutables qui étonnent : des quotas d’étrangers dans les quartiers pour forcer la mixité et empêcher la formation de ghettos, des questionnaires, un test de citoyenneté pour obtenir la nationalité danoise … C’est donc une loi élitaire qui sélectionne les entrées dans le pays.
Les résultats sont bien là, d’un point de vue purement statistique. La politique migratoire danoise semble être convaincante et efficace, peut-être même au-delà des objectifs prévus par les gouvernements précédents. De plus, le vivre ensemble danois n’a pas été affecté. L’objectif du Danemark est clair : assurer la permanence et la pérennité de l’Etat Providence. Les socio-démocrates en sont donc arrivés à la conclusion que pour bien intégrer, il faut intégrer moins.
La situation en France
Contrairement au Danemark, en France la gauche ne s’est pas emparée du sujet de l’immigration. Aujourd’hui, les différents partis de gauche ont déplacé leur combat social et économique au combat culturel. Comme l’affirme Laurent Bouvet, regretté professeur d’université et essayiste français, « l’erreur de la gauche a été de croire qu’elle pouvait se construire sans le peuple ».
Aujourd’hui le constat est accablant : selon le dernier sondage Odoxa-Backbone consulting, l’opinion critique l’action du gouvernement en matière d’immigration. En effet, 74% des personnes interrogées considèrent qu’il y a trop d’immigrés en France.
Face aux tergiversations de l’exécutif sur le projet de loi immigration, Les Républicains ont lancé une offensive législative. Dans le JDD, Éric Ciotti, Bruno Retailleau et Olivier Marleix ont annoncé déposer deux propositions de loi sur le sujet – la première, ordinaire, et la seconde, constitutionnelle. Ce, pour apporter une « solution de droite » pour « mettre fin à une situation incontrôlée ». Ce jeudi 1er juin, la droite a ainsi déposé son premier texte.
Invitée de Public Sénat, Laure Lavalette, porte-parole du groupe RN à l’Assemblée nationale, a pointé les similitudes entre le programme présidentiel de Marine Le Pen sur l’immigration et les deux propositions de loi présentées le week-end dernier par Les Républicains. Cela ouvre donc un boulevard au Rassemblement National car comme le déclare madame Lavalette : « finalement, les propositions de Marine Le Pen n’étaient pas si ubuesques que ça ».
Le président Emmanuel Macron s’en rend bien compte. Ce dernier a par ailleurs recadré la Première Ministre Elisabeth Borne qui avait déclaré que le Rassemblement National était héritier du régime de Pétain. Pour le chef de l’État, « il faut décrédibiliser » le RN « par le fond et les incohérences », en l’attaquant « par le concret » et le « réel », et non en utilisant des « mots des années 90 qui ne fonctionnent plus ». Selon Emmanuel Macron « le combat contre l’extrême droite ne passe plus par des arguments moraux. On n’arrivera pas à faire croire à des millions de Français qui ont voté pour [Marine Le Pen] que ce sont des fascistes ».
Quelle issue pour le gouvernement ?
« Gérald Darmanin a un mandat clair pour mener les consultations et pour construire une majorité. L’idée, c’est d’avoir un texte avant l’été pour l’examiner à l’automne », explique-t-on dans l’entourage du ministre de l’intérieur.
Il sera pertinent de voir comment le groupe LR et le gouvernement vont s’entendre afin de faire avancer ce projet de loi. Les Républicains restent une pièce maîtresse sur l’échiquier politique, et un allié potentiel que le pouvoir pourrait solliciter.