Un réchauffement climatique bien à l’oeuvre
Depuis l’ère préindustrielle, les évolutions de CO2 ne cessent d’augmenter. En effet, depuis 1900, nos émissions de CO2 ont été multipliées par 7, passant d’environ 6 GtCo2 annuel en 1900 à environ 41 GtCo2 annuel en 2022. Et si certains défendaient jusqu’alors la thèse d’un réchauffement naturel de la planète et donc non causé par l’homme, le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) a définitivement tranché sur la question dans le premier volet de son sixième rapport publié en août 2021. Ce dernier annonce qu’il est « incontestable que l’influence humaine a réchauffé l’atmosphère, les océans et les terres ».
C’est d’ailleurs dans un communiqué de presse du GIEC en avril 2022 que le professeur James Skea souligne que « Si nous n’agissons pas aujourd’hui, il sera trop tard : nous ne pourrons plus limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C (2,7 °F)». Il faut donc agir maintenant et efficacement. Et quoi de mieux que de planter des arbres pour sauver la planète ? C’est en tout cas ce que pense Thomas Crowter, professeur à l’université ETH de Zurich. (Global Carbon Project, Ecotree)
Une solution miracle ?
Dans ses recherches, il décrit en effet le potentiel « époustouflant » de ces puits de carbone naturels. Ce serait selon lui la solution « la moins chère » et « la plus importante ». Certains projets les plus efficaces réussissent même à reforester pour 0.30 $ par arbre. Mais surtout ce serait une solution à la portée de tous. Une manière pour chacun d’agir à son échelle. Il estime alors qu’on pourrait planter 1 200 milliards d’arbre sur Terre sans empiéter sur les surfaces agricoles. Ce qui permettrait l’absorption de 200 milliards de tonnes de CO2, d’ici 50 à 100 ans. Cette solution semble donc intéressante sur le long terme. Mais il faut appuyer sur la pédale de frein dès aujourd’hui et cela, la reforestation ne le permet pas.
Malgré le fait que cette solution ne soit pas autant mise en avant que le voudrait T.Crowter, on observe une tendance croissante à la naissance de projets de reforestation. Effectivement, on retrouve aujourd’hui des associations et entreprises qui se lancent dans diverses actions. C’est le cas d’Ecosia, Cœur de forêt ou encore l’AARCE. De plus, des challenges mondiaux pour la reforestation voient le jour. On peut parler de « Le défi » de Bonn lancé en 2011. Il regroupe gouvernements, entreprises et associations du monde entier. Ce dernier vise à reforester à hauteur de 350 millions d’hectares d’ici 2030. (The guardian, Ecotree)
Reforester, c’est un métier
Reforester sonne alors comme une solution idéale. Hélas, ce n’est pas si simple qu’il n’y paraît. L’entreprise Ecotree se prononce à ce sujet : « Il ne suffit pas de semer des graines, il faut encore être capable d’accompagner la pousse des plantes et de les aider à atteindre leur maturité dans de bonnes conditions. Être forestier est un métier. Et les forêts doivent être traitées avec respect. ». La reforestation n’est donc pas si aisée que l’on pourrait le croire. Pour preuve, nous pouvons étudier le cas de la Turquie. En 2020, son projet « Breath for Future » a planté 11 millions d’arbres. Mais 90% d’entre eux n’ont pas survécu plus de trois mois par manque d’eau.
« Nous avions signalé que les conditions n’étaient adaptées, qu’il n’y avait pas assez de précipitations et qu’il n’était pas souhaitable de mener une telle campagne juste pour entrer dans le Guinness des Records » s’insurgeait Şükrü Durmuş, président du syndicat de l’agriculture et des forêts, dans le journal Cumhuriyet. Mais ce n’est pas un cas isolé. De la même manière, entre 70 et 80% des arbres plantés en Ethiopie entre 2000 et 2015 sont finalement morts. Des plans ambitieux de reforestation sont nécessaires, il est vrai, mais ceux-ci doivent penser avec minutie aux conditions de vie des arbres. (GEO, Le Monde, Les échos, Ecotree)
L’importance de la diversité
Dans cette même idée, la reforestation massive peut être plus ou moins bénéfique selon les espèces d’arbres que l’on va planter. En effet, certaines espèces peuvent fragiliser un territoire en impactant les écosystèmes locaux ou en appauvrissant les sols. Mais surtout, la mixité des espèces plantées lors d’une reforestation massive est cruciale. C’est en tout cas ce qu’a prouvé une équipe de chercheurs pour le magazine Sciences. La diversité, si les espèces choisies sont compatibles, permet aux arbres de s’entraider dans leur développement. Cette diversité leur permet de produire plus de biomasse tout en restaurant une certaine biodiversité.
Le magazine Décisions Durable dénonce par exemple ces forêts « de pins plantés sans le moindre souci de biodiversité de résilience, qui ont favorisé les engouffrements des vents et la rapide propagation des flammes » à la suite des incendies massifs qui sont survenus à l’été 2021 dans le Var. Même si les pins sont des arbres qui repoussent plus facilement que d’autre à la suite de feux d’après l’INRAE. Cette stratégie de monoculture semble discutable. Surtout dans un monde où le réchauffement climatique va s’accélérer et les feux de forêts s’intensifier. (Decisions durables, CNRS, INRAE)
La reforestation est un levier majeur pour ralentir le réchauffement climatique mais celle-ci reste assez discutable. Après analyse, le GIEC préconise une reforestation raisonnée. Nous devons être particulièrement vigilants lors de la mise en œuvre de celle-ci car nous n’avons plus le droit à l’erreur.