Son réalisateur Lukas Dhont
Nommé ex aequo « Grand Prix » du festival avec Stars at noon de la française Claire Denis, Close est le second long-métrage de Lukas Dhont, jeune réalisateur et scénariste belge de 31 ans qui avait déjà obtenu la Caméra d’or et la Queer Palm à Cannes en 2019 pour Girl. Ici, il porte à nouveau la cause LGBTQ+ en investissant cette fois-ci non plus le thème de la transidentité mais de l’homosexualité, ou plutôt de sa perception. Toutefois, il déclare que Close ne se réduit pas à un film « queer », car il touche aussi à un autre thème majeur et universel qu’est l’amitié. Suite à la salve d’applaudissements qui a salué avec force cette première représentation à Cannes le 26 mai 2022, il prend la parole pour remercier son équipe mais aussi pour souligner la portée toute personnelle de ce sujet dans sa propre vie.
Synopsis
Cette œuvre bouleversante dépeint l’amitié fusionnelle qui unit deux garçons de treize ans, dont l’entrée au collège signe l’ébranlement. Leur relation se caractérise par une forte proximité (ils sont « close »), notamment physique, ce qui entraîne des moqueries et remarques de la part de leurs camarades, qui ne la comprennent pas et la catégorisent comme une liaison amoureuse. Les deux amis sont confrontés au regard des autres, et à l’injonction de répondre à des questions identitaires qui les dépassent. Cela suscite un chamboulement dans leur relation, qui n’est plus aussi simple et spontanée qu’avant ; désormais, chaque geste ou parole est matière à interprétation voire surinterprétation, en particulier pour l’un d’eux, et ils ne sont plus sur la même longueur d’ondes.
Lukas Dhont ne tranche jamais sur la nature précise du lien unissant Léo et Rémi, et interroge notre propension à vouloir faire rentrer dans des cases ce qui semble sortir de la norme. Il montre que ce qui compte semble être moins la nature de leurs sentiments, et leur adéquation ou non avec des schémas sociaux préétablis, que l’intensité et la singularité de la relation. Il insiste aussi sur le poids du regard des autres, quelques remarques seulement engendrant des effets immenses, à un moment crucial de construction de soi, qui va de pair avec une certaine fragilité identitaire.
Grâce à une focalisation qui se place à hauteur d’enfant, Lukas Dhont parvient à traiter un sujet difficile avec finesse et subtilité. Il évite les écueils habituels des mélodrames que peuvent être le larmoyant ou le pathétique à outrance, et offre un film dont le mot d’ordre semble être la justesse. Abordant donc aussi les thèmes de la masculinité et de l’enfance, ce long-métrage d’une heure et demie fera verser une larme même aux plus endurcis.
L’acteur Eden Dambrine
On ne peut évoquer ce film sans souligner le talent d’acteur du jeune Eden Dambrine dans le rôle de Léo. Et pourtant, cet adolescent belge de quinze ans aurait bien pu ne jamais jouer : en effet, il fut sélectionné tout à fait par hasard, au détour d’une rencontre fortuite avec Lukas Dhont. Celui-ci lui aurait proposé de jouer dans son film, appréciant l’aura et l’élégance du jeune homme. Close constitue ainsi son premier rôle en tant qu’acteur – et son premier succès. Ce jeune homme prometteur a pu nous communiquer son enthousiasme lors de cette première représentation, un large sourire aux lèvres, embrassant son équipe et remerciant avec chaleur le public.
Close est donc un film qui a de quoi nous faire réfléchir. Il signe en tout cas l’affirmation de plusieurs jeunes talents, dont on attend impatiemment les prochains projets.
Voir aussi « Masculinity » de Lucky Love : dénoncer la masculinité toxique pour voir comment d’autres artistes traitent des questions de masculinité et d’identité, à travers ici un autre médium qu’est la musique.