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5 ans d’inéligibilité pour Le Pen: un tournant pour la politique française

C'est une onde de choc qui secoue la sphère politique française. Marine Le Pen, figure incontournable du Rassemblement National, a été condamnée à quatre ans de prison, dont deux avec port d'un bracelet électronique, ainsi qu'à une interdiction d'exercer des fonctions publiques pendant cinq ans. L'affaire, liée à un scandale de détournement de fonds européens, soulève des questions brûlantes : la critique de l'Etat de droit est-elle devenue acceptable ?

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Marine Le Pen sort du tribunal après que la cour est rendu son jugement, le 31 mars 2025, à Paris. (Photo by Tom Nicholson/Getty Images)
Marine Le Pen sort du tribunal après que la cour est rendu son jugement, le 31 mars 2025, à Paris. (Photo by Tom Nicholson/Getty Images)

5 ans d’inéligibilité pour Marine Le Pen

Le parquet a donc suivi les réquisitions des procureurs. Marine Le Pen est condamnée à quatre ans de prison, dont deux ans ferme, et à cinq ans d’inéligibilité avec application immédiate. Si la cour a décidé d’un application immédiate, c’est parce qu’elle craint une récidive. En effet, Marine Le Pen a basé toute sa défense sur une négation des faits. Elle a déjà annoncé faire appel de cette décision. Cependant, le délai pour un appel devrait compliquer une candidature pour les élections présidentielles, dans le cas où la cour d’appel revenait sur la décision.

Pour rappel, cette loi sur l’inéligibilité a été votée à la suite de l’affaire Cahuzac. A cette époque, Marine Le Pen défendait une vision très ferme.

« J’ai entendu le Président dire qu’il faudrait rendre inéligibles à vie ceux qui ont été condamnés – jusque-là j’étais parfaitement d’accord, c’était dans mon projet présidentiel – pour corruption et fraude fiscale. Mais pourquoi pas le reste ? Pourquoi pas pour le favoritisme ? Pourquoi pas pour détournement de fonds publics ? Pourquoi pas pour des emplois fictifs ? »

Marine Le Pen, le 5 avril 2013, Public Sénat

Pour la présidente du tribunal, Marine Le Pen “n’est pas l’initiatrice de ce système mais s’est inscrite dans les pas de son père. Ces faits constituent un contournement du fonctionnement démocratique.

Des peines exemplaires pour des tauliers du RN

Louis Aliot, maire de Perpignan, est condamné à six mois de prison ferme et trois ans d’inéligibilité, mais pas immédiate lui permettant de garder son poste de maire de Perpignan. Lui-aussi a annoncé faire appel de la décision dans un communiqué sur le compte X de la Ville. 

Julien Odoul, vice-président du Rassemblement National et député de l’Yonne est condamné à huit mois de prison avec sursis et une inéligibilité d’un an, sans exécution provisoire. Pour France 3 Bourgogne-Franche-Comté, “le député de l’Yonne n’avait pas réussi à expliquer les raisons pour lesquelles il avait demandé en 2015 à « faire connaissance » avec l’eurodéputé qui l’employait.

Finalement, le parti du Rassemblement National écope d’une amende de 2 millions d’euros, dont un million ferme. 

« Je soutiens Marine »

A l’international, les réactions sont tombées depuis toutes les grandes capitales européennes. A Moscou, le porte-parole du Kremlin parle de “violation des normes démocratiques. Pour Viktor Orban, Premier Ministre Hongrois, c’est simple et efficace : “Je suis Marine !”. Reprenant ainsi la rhétorique de Je suis Charlie, il suit le mouvement en France de soutien à Marine Le Pen. 

Matteo Salvini, vice-Premier Ministre italien prend cette condamnation comme une “déclaration de guerre de Bruxelles”. Enfin, à Amsterdam, Geert Wilders se dit “choqué par le verdict extrêmement sévère rendu contre [Marine Le Pen]. Je la soutiens et crois en elle à 100 % et je suis convaincu qu’elle gagnera son appel et deviendra présidente de la République française”. 

Marine Le Pen a su intensifier ses relations avec de nombreux dirigeants européens depuis plusieurs années. Ces réactions marquent un appui réciproque entre les partis populistes européens. 

En France, entre prise d’acte et remise en cause de l’autorité judiciaire

Pour les élus du Rassemblement National, il est clair que ce procès était politique. Dès l’annonce du jugement, la réaction ne s’est pas fait attendre. Jordan Bardella, président du RN, dénonce une « atteinte grave à la démocratie« , tandis qu’Éric Zemmour et d’autres figures de la droite dure estiment que ce procès a un objectif clair : éliminer un adversaire politique par la voie judiciaire.

En fin d’après-midi, Jordan Bardella appelait à “une mobilisation populaire et pacifique”. Remettant en cause la séparation des pouvoirs, les élus du Rassemblement National ont été soutenus par des alliés d’un autre bord. Jean-Luc Mélenchon considère que “la décision de destituer un élu devrait revenir au peuple”. Rappelons tout de même que la loi appliquée par les juges est votée par la représentation nationale. Pour les Écologistes, les Socialistes et les Communistes, la ligne est claire : la loi est la même pour tous. 

Suite aux prises de positions de différents élus, le Conseil supérieur de la magistrature a dénoncé des réactions “de nature à remettre en cause gravement l’indépendance et l’autorité judiciaire”.

Un parti en pleine tempête

Cette affaire met le Rassemblement National face à un dilemme crucial. Avec Marine Le Pen écartée de la course à l’Élysée en 2027, le parti doit redéfinir son avenir. Bardella pourra-t-il capitaliser sur cette affaire pour renforcer son leadership, ou verra-t-on émerger une nouvelle tête d’affiche ? La désillusion d’une partie de l’électorat pourrait aussi rebattre les cartes à droite, ouvrant la porte à d’autres figures comme Marion Maréchal ou Éric Ciotti.

En interne, l’affaire crée des tensions. Certains cadres du RN s’inquiètent de la capacité du parti à surmonter une telle crise alors que l’électorat populaire reste dépendant de la figure historique de Marine Le Pen. Si Jordan Bardella semble prêt à prendre la suite, il n’a pas encore le charisme et l’expérience nécessaires pour rassembler l’ensemble des sympathisants du RN.

Un effet boomerang possible ?

Loin d’être un coup fatal, cette condamnation pourrait paradoxalement renforcer l’aura de Marine Le Pen. Victime d’un « système » aux yeux de ses partisans, elle pourrait devenir une martyre politique, galvanisant un électorat déjà convaincu d’un « complot » contre elle.

Loin d’être abattue, Marine Le Pen s’est montré « combative » toute la journée. Lors du JT de 20h de TF1, Marine Le Pen est revenue sur une « décision politique » selon elle. Elle regrette que des « millions de français » soient « privés de la candidate favorite à la présidentielle ». Elle affirme que les juges de première instance se sont « trompés », et demande à la justice de se hâter.

Interrogé sur son possible dauphin, elle rappelle que Jordan Bardella est un « atout formidable » mais espère ne pas avoir à utiliser cet atout. Ces critiques de l’Etat de droit laisse planer un climat délétère que le journaliste Gilles Bouleau a bien tenter d’abattre.

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