Adoptée à l’Assemblée nationale le 23 avril 2013, la loi ouvrant le mariage pour tous a durement marqué le début du quinquennat de François Hollande. Avec 331 voix pour, 225 contre et 10 abstentions, le projet de loi porté par Christiane Taubira, alors garde des Sceaux, a suscité de vives turbulences, autant dans la rue que dans l’hémicycle.
2013, une France fracturée
Si l’actuelle loi sur la réforme des retraites plonge le pays dans un état de profonde division, celle sur le mariage homosexuel a aussi créé un gouffre entre le Parti socialiste et la droite (UMP). Plusieurs centaines de milliers de personnes étaient descendues dans les rues lors du mouvement “Manif pour tous”.
“Un papa une maman, on ne ment pas aux enfants”, était il possible d’entendre ou de lire sur certaines pancartes présentes dans les cortèges. En 2013, selon un sondage BVA, 58 % des Français étaient favorables au mariage pour tous, soit un peu plus d’un habitant sur deux.
Les affrontements verbaux entre les deux classes politiques au Parlement étaient rudes. Certains députés ne passaient pas par quatre chemins pour exprimer leurs profonds désaccords aux micros de l’Assemblée nationale. Jusqu’aux derniers instants de débat, les tensions étaient palpables. Des opposants à la loi s’étaient même infiltrés pour manifester leur désaccord dans le public venu assister aux débats.
Après le vote, les oppositions avaient déposé un recours auprès du Conseil constitutionnel afin de censurer la loi. Les “sages” avaient approuvé le texte qui avait, par la suite, été promulgué par François Hollande dans le Journal officiel.
Mea culpa, regrets et ancrage dans la société
Plusieurs personnalités politiques encore actives aujourd’hui, n’étaient pas favorables au texte proposé par l’ancien gouvernement. C’est le cas de Valérie Pécresse qui avait elle-même intégré certains cortèges dans les rues de Paris, tout comme Éric Ciotti, l’actuel président du parti Les Républicains. Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin ou encore l’ancienne député Les Républicains, Catherine Vautrin, avaient fait le choix de voter contre la loi lorsqu’ils étaient députés.
Aujourd’hui, toutes ces personnalités se sont exprimées, dix ans après, sur l’adoption du mariage pour tous. Certaines ont avoué s’être trompées, c’est le cas de Gérald Darmanin qui expliquait lors d’une interview à La Voix du Nord, que “si c’était à refaire, je voterais le texte”. Catherine Vautrin s’est elle, exprimée sur Twitter, “Il y a 10 ans en ne votant pas le mariage pour tous, j’ai raté ce rendez-vous qui est aujourd’hui devenu une évidence”.
Valérie Pécresse a expliqué, un peu plus d’un an après le texte voté, “avoir changé d’avis parce que tout simplement, [elle a] réfléchi”. Enfin, en 2017, Éric Ciotti disait quant à lui, “je pense que ce texte est dans le droit et qu’on ne doit pas revenir dessus”.
“Une étape dans un projet beaucoup plus long”
Cependant, le mea culpa de Darmanin, n’est pas au goût de tous. Opposés à l’époque au mariage pour tous, le président de Reconquête! Éric Zemmour tout comme l’eurodéputé Les Républicains François-Xavier Bellamy ont déclaré dimanche 23 avril ne rien regretter. Au contraire, ces derniers sembleraient d’autant plus inquiets qu’un glissement vers la légalisation de la gestation pour autrui (GPA) voit le jour. “Quand je relis ce que j’ai pu écrire ou dire à cette occasion-là, je constate que tout ce que nous disions avec ceux qui s’opposaient” au mariage pour tous “s’est réalisé”, a affirmé Bellamy, sur Radio J. “Ce qui était en jeu, c’était un modèle de société qui incluait l’extension de la PMA (…) et la gestation pour autrui”, a-t-il revendiqué, attestant que “ce que nous dénoncions a fini par advenir”.
Interviewé sur BFMTV ce dimanche, Éric Zemmour a soutenu des propos dans cette même lignée, allant à l’encontre de «l’accumulation des mea culpa» récents, des ministres Gérald Darmanin ou encore Christophe Béchu. “J’étais hostile à ce mariage pour tous parce que (…) je savais que ce mariage était une étape (…) dans un projet beaucoup plus long”, a-t-il détaillé. “En vérité, après le mariage (…) il était prévu qu’il y ait ensuite la PMA pour les femmes seules et les couples de lesbiennes et la GPA pour les hommes homosexuels. Eh bien on y est presque”, a-t-il assuré.
De fait, si la procréation médicalement assistée, ladite PMA, pour toutes les femmes est effectivement en vigueur en France depuis fin septembre 2021, ce n’est pas le cas de la gestation pour autrui (GPA).
14e pays du monde à adopter le mariage pour tous
Le résultat de ce vote a amené la France à devenir le 14e pays du monde et le 9e pays européen à autoriser le mariage pour les personnes de même sexe. Aujourd’hui, 34 pays autorisent désormais le mariage pour tous partout dans le monde, avec comme dernier en date, Andorre en février dernier. Depuis l’entrée en vigueur de la loi en France en 2013, un peu plus de 70 000 unions de couples homosexuels ont eu lieu.